Pour rester au diapason
A l'instar de Honda, Yamaha a fait évoluer son icône sportive en douceur l'an dernier. Même si d'aucuns regretteront qu'il n'y ait aucun virage esthétique notable, il s'agit bien là d'une R1 repensée à défaut d'être nouvelle.
Nous nous imaginions quittant les locaux de l'importateur belge au guidon d'une R1 " Racing Blue ", manque de pot : comme elles sont produites en nombre limité et qu'elles ont toutes été rapidement réservées, on s'est contentés de deux décos 2012, grise et blanche.
Comme de juste, le dossier de presse en fait des tonnes pour justifier a posteriori les choix de coloris de l'usine . nous nous bornerons à dire que ces deux décos toujours disponibles sont plutôt classe quoiqu'un peu ternes et nous laisserons le mot de la fin à Christian, le mécano gérant le parc presse Yamaha : " Une chose est sû.re avec ce coloris gris mat : c'est plus facile à nettoyer, car il ne retient ni les traces ni les reflets parasites. " Après tout, ce peut être un argument de vente...
Tendance
Au fond, rien n'avait fondamentalement changé sur la R1 depuis l'adoption du Crossplane en 2009 (Vilebrequin à plans croisés inspiré du MotoGP avec séquence d'allumage asynchrone de 270º. - 180º. - 90º. - 180º.). Il était donc temps pour Yamaha d'actualiser son fer de lance sportif l'an dernier.
A un niveau de détail d'abord, on remarquera un carénage avant redessiné avec adoption de LEDs qui en soulignent le regard, un nouveau té de fourche ajouré inspiré de celui des M1 de MotoGP et de nouveaux repose-pieds limitant au maximum le risque de glisse de la botte à leur contact (résultat concluant d'ailleurs). On ajoutera des silencieux désormais hexagonaux visant à effiler l'arrière.
Un travail plus lourd a été consenti sur le boî.tier principal : afin d'améliorer maniabilité et agrément, la R1 2012/2013 bénéficie d'une nouvelle unité de commande du moteur. La cartographie remaniée prend en charge le contrôle électronique de l'ouverture des gaz YCC-T (Yamaha Chip Controlled Throttle), ainsi que le volume d'injection et les fonctions de calage de l'allumage. Ces changements apportés à la gestion moteur sont censés améliorer l'agrément à bas et mi-régimes, ce qui doit se traduire par une sortie de virage plus puissante et une meilleure accélération progressive lors des dépassements. Globalement, nous estimons au terme de notre essai que ce but est atteint, car la R1 s'avère effectivement plus plaisante à conduire que dans ses millésimes précédents, même s'il faudra toujours composer avec son manque de souplesse caractéristique depuis le passage au calage big bang : disons que l'actuelle cesse de rouspéter vers 3000rpm alors que c'était plutôt 4000rpm depuis 2009. Enfin, la grosse nouveauté depuis 2012 est sans conteste l'apparition du TCS (Traction Control System), un antipatinage à 6 modes (7 si on considère qu'il est déconnectable).
Le TCS Yamaha est en constante communication avec des capteurs situés sur les roues avant et arrière. Ainsi, en cas de patinage de la roue arrière, le système alerte l'unité de commande du moteur qui ajuste instantanément l'ouverture des gaz, le volume d'injection et le calage de l'allumage. Si l'on utilise par ailleurs la fonction de cartographie variable en 3 modes apparues également en 2009, la R1 2012/2013 offre un total de vingt-et-une options de réglage. Un peu casse-tête, mais sécurisant ! Il faut reconnaî.tre leur efficacité aux cartographies définies par Yamaha, et rappelons qu'elles n'agissent pas directement sur la puissance, mais sur la manière dont cette puissance est délivrée. La position standard convient à virtuellement toutes les circonstances. elle procure déjà d'excellentes sensations moteur sans qu'on craigne d'être dépassé par la cavalerie. Le mode A rend l'arrivée de la puissance nettement plus démonstrative, wheelings à la clé. la R1 devient agressive, presque méchante mais reste exploitable, légitimant par là la débauche technologique déployée dans son moteur. Le mode B l'assagit jusqu'à la rendre un peu fade. nous le réserverions à un usage sur chaussée détrempée et encore, le mode standard fait l'affaire dans ce cas de figure également. Quant à l'influence de ces cartographies sur la consommation, elle s'avère peu importante, et sachez à ce propos que notre consommation moyenne s'est stabilisée à 8,7L/100km. Bien sû.r, circuit aidant (là, on monte à 11L/100km), nous n'avons guère ménagé la monture, mais c'est tout de même un bon litre de plus que la CBR 1000 RR... Nous aurons fait le tour du propriétaire lorsque nous aurons souligné que la nouvelle R1 continue évidemment de profiter des acquits antérieurs du modèle, tels l'accélérateur électronique et l'admission variable, qui avait transfiguré le modèle en 2007.
Routière...
Toujours belle (même si la ligne générale reste héritée du modèle 2004) et bien finie, la R1 sait focaliser les regards. Elle s'apprécie sous toutes les coutures, mais les puristes regretteront l'apparition de caches en plastique assez peu flatteurs, notamment au niveau des tubulures d'échappement. De même, les silencieux ne remportent pas tous les suffrages bien qu'ils soient plus compacts. On aime au contraire la partie cycle, le nouveau té de fourche allégé, l'instrumentation et le réglage des pose-pieds, bien que le cache échappement droit vous oblige à chipoter pour les rehausser. Quant à l'amortisseur de direction de série, il a certes le mérite d'être présent, mais aurait sans conteste gagné à être réglable. car lorsqu'on lâche les chevaux en mode A, la machine se cabre volontiers sur les deux rapports initiaux, et l'amortisseur a parfois un peu de mal à harmoniser l'atterrissage...
La R1 serait-elle aussi une routière ? S'agissant du confort de conduite dévolu à son pilote, nous répondons par l'affirmative car le réservoir n'est pas trop volumineux et la position, pour peu que les pose-pieds restent baissés, se supporte aisément dans la durée. Il y a juste l'appui sur les poignets qui embêtera les plus sensibles, mais ç.a reste très supportable par rapport aux autres superbikes actuelles, sauf la GSXR 1000. Les urbains n'apprécieront que modérément les dégagements de chaleur très présents à la cuisse droite et au postérieur. Quand l'espace s'élargit, on note une protection décente offerte par la bulle à double courbure, même sur autoroute pour peu qu'on n'y croise pas à plus de 160km/h. On apprécie le filtrage efficace des vibrations alors qu'elles nous gênaient sur la CBR 1000 RR 2012. Par contre, pour celui qui se trouve derrière vous, cette R1 est un enfer. Depuis 2004 et le passage aux échappements sous la selle, le passager a littéralement le feu au c... sans compter que l'habillage arrière, élargi pour isoler les silencieux, ne laisse que peu de place à ses pieds. Eh bien en 2013, c'est tout pareil mais en pire. Vu la largeur des silencieux, il reste 2cm de pose-pied exploitables. résultat vécu: à chaque accélération ou freinage appuyés, les pieds du passager se retrouvent dans le vide, ce qui induit pour lui un équilibre plus que précaire. Ajoutez-y une selle minimaliste et particulièrement dure et vous obtenez un tableau rédhibitoire si vous comptez emmener régulièrement quelqu'un avec vous. Enfin, ceci dit, Yam a tout de même prévu quelques accessoires civilisants...
Mais passons plutôt de la théorie à la pratique: contact ! La sonorité rauque que l'on attend d'un gros 4-cylindres se mue ici en grognement caverneux qu'on croirait sorti d'un V-4 et même, à certains régimes, d'un bicylindre. Cette sonorité est une vraie surprise, et il faut un moment pour s'y habituer. En tous cas, elle est très typée, un peu comme sur les machines équipées d'une distribution pneumatique: " Son bruit ne ressemble vraiment à aucun autre, nous confie un mécano Yamaha, sauf peut-être, au-delà de 10.000rpm, à une M1 de MotoGP. " On atteint là l'essence même de cette R1 2012/2013.
Car ce moteur, qu'on attendait civilisé pour mieux domestiquer la puissance, réussit néanmoins à sauvegarder le caractère. Oui, il parvient à pousser très fort en ménageant de vraies sensations à son pilote. il ne s'agit donc pas d'un moteur linéaire, mais d'un propulseur à la personnalité affirmée dont les envolées ménagent leur lot de plaisir, mais sans brutalité pour peu qu'on préfère le mode Standard au mode A. Le seul bémol que nous émettrons concerne son manque de souplesse. En effet, sous les 3000rpm, n'en attendez pas trop. il lui faut parvenir à ce régime pour s'éveiller avec vigueur et comme rebondir ensuite à 6500 et vers 10000rpm. Ce manque de souplesse, qu'on note quelle que soit la cartographie sélectionnée, est particulièrement présent dans les petits coins négociés à très faible allure . mais on le lui pardonne tant ce moteur est vivant et réjouit son pilote sur chaque accélération. En vérité, en usage routier, cette R1 ne surprend pas, si ce n'est -et dans le bon sens- par le confort préservé de son pilote. Entendez par là que son comportement dynamique est tel que vous pensez l'avoir toujours connue: facile, saine, précise et stable. De leurs côtés, les transmissions sont aux standards japonais avec un embrayage doux et dosable, ainsi qu'une boî.te précise et au verrouillage sû.r. Dommage que la consommation se rappelle à votre bon souvenir par le biais d'un ordinateur de bord fort précis...
Et pistarde avec un égal bonheur !
S'il est vrai que la R1 s'accommode fort bien de la route, elle parviendra tout de même à accélérer votre pouls en remontant la pit-lane. Dans le paddock, les connaisseurs s'agglutinent et les questions fusent sur la disponibilité moteur, sur le freinage, sur le châssis. " Elle semble lourde, me dit un pilote qui la soupèse en la soulevant de sa béquille. " Pourtant, par rapport au modèle 2009 qui avait du mal à tourner, la lourdeur initiale de l'avant a bel et bien disparu. En entrée de courbe, la R1 d'origine est encore un peu sous-vireuse et il convient de déhancher autant que possible pour l'aider à tourner, mais sa précision une fois sur l'angle fait le reste. Depuis 2009, dans un pif-paf, on passait par une étape intermédiaire où l'on sentait la moto un peu rétive à changer d'angle. ce phénomène a disparu si on travaille avec les jambes et avec les hanches. La tenue du cap choisi ne pose quant à elle pas le moindre souci à la Yamaha, pourvu qu'on la rive vigoureusement à son cap. Très stable sur l'angle, elle profite aussi d'une excellente motricité imprimée par le couple amortisseur/bras oscillant (allongé en 2009). Disons qu'elle reste un peu plus physique qu'une CBR ou qu'une ZX10, mais elle compense par son caractère moteur qui vous fait, au sens propre, vivre le Big Bang à chaque accélération et ce, même sur une piste.
De son côté, le freinage assure plutôt sur la durée qu'il n'impressionne en puissance pure. Depuis 2009, Yamaha a travaillé sur le feeling offert, et cela se sent . c'est tout bénéfice pour la sérénité du pilote car il sait qu'en cas de besoin, il peut en " rajouter une couche " sans crainte de ne pas sentir venir la limite. Evidemment, on n'en est pas à la tranquillité totale distillée par un ABS racing, mais pour une moto qui en est dépourvue, la R1 vous met bien en confiance. Au rayon moteur, répétons-le, Yamaha peut revendiquer l'éméritat: ce R1 big bang est un régal, une démonstration de savoir-faire technologique. On peut se permettre bien des choses au guidon de cette R1 2013 car, pour autant qu'on évite le mode A (grisant mais violent), ce moteur est d'une disponibilité parfaite sans jamais faire preuve de brutalité. On se souviendra de cette réflexion de Sébastien Charpentier lors des essais du GP du Qatar SBK en 2009: " C'est fou comme cette R1 Big Bang permet à Spies de réaccélérer bien plus tôt que tous les autres! " Sans être pilote de MotoGP, on expérimente facilement cette latitude que procure le calage big bang: là où la plupart s'ingénient à freiner plus tard pour gagner du temps, on peut aussi, au guidon de la R1, jouer à accélérer de plus en plus tôt, à l'instar des pros qui se permettent de dégainer les watts dès le point de corde. Mais alors, que demande le peuple ? Ah oui, je sais : moins de dégagements de chaleur et une consommation ainsi qu'un prix de vente en baisse !
Fiche technique
Yamaha YZF R1 - 16490&euro.
Moteur Type de moteurà refroissement liquide, 4 temps, quatre cylindres en ligne inclinés vers l'avant, DACT, 4 soupapesCylindrée998ccAlésage x course78,0 mm x 52,2 mmTaux de compression12,7 : 1Puissance maximale133,9 kW (182,1PS) @ 12.500 rpm (without air-induction)Couple maximal115,5 Nm (11,8 kg-m) @ 10.000 rpmLubrificationCarter humideCarburateurInjection électroniqueEmbrayageà bain d'huile, multidisque à bain d'huileAllumageTCI (digital)Mise en routeélectriqueTransmissionPrise constante, 6 vitessesTransmission finaleChaî.ne Châssis CadreDeltabox en aluminiumGéométrie de la suspension avantUpside-down telescopic fork, Ø. 43 mmDébattement avant120 mmAngle de chasse24º.Chasse102 mmGéométrie de la suspension avant(Monocross), MonoamortisseurDébattement arrière120 mmFrein avantDouble disque à commande hydraulique, Ø. 310 mmFrein arrièreSimple disque à commande hydraulique, Ø. 220 mmPneu avant120/70 ZR17M/C (58W)Pneu arrière190/55 ZR17M/C (75W) Dimensions Longueur hors tout2.070 mmLargeur hors tout715 mmHauteur hors tout1.130 mmHauteur de selle835 mmEmpattement1.415 mmGarde au sol minimale135 mmPoids (comprenant l'huile et le plein de carburant)206 kgCapacité essence18 litresCapacité en huile3,7 litres
Importateur : D'Ieteren Sport, Parc industriel de la vallée du Hain 37B-1440 Wauthier-Braine, +32 (0)2/367.14.11, www.yamaha-motor.be
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