L’année 1992 marque l’arrivée sur le marché de la moto d’une nouvelle Ducati qui 25 ans plus tard fait toujours parler d’elle, chavire encore et toujours les cœurs et provoque des frissons : La Monster. Née « il Mostro » de par son papa Miguel Galluzzi, elle deviendra Monster suite au rachat de Ducati par le « Texas Pacific group ». Depuis lors, elle restera Monster sur papier. Pas mal de fans et/ou propriétaires continuent à la nommer affectueusement « Mostro ».
L’objectif de la Monster était d’offrir des sensations de sportive sans en avoir les inconvénients en cas de chute (pas ou peu de plastic) et une position de conduite moins contraignante. Celle par qui tout a commencé offrait un moteur de 900ss, un cadre tubulaire déjà typique, un réservoir, une selle, un guidon large et Basta !
Niveau sensations de conduite, elle a fait fort, marqué toute une génération au fer rouge et s’est vue ensuite déclinée à toutes les sauces avec plus ou moins de succès d’ailleurs. Dans la famille des méchantes Monster, on a pu compter sur les déclinaisons S4, S4R et S4RS dotées des moteurs 4 soupapes de sportives de la gamme, autant dire des Monster avec des gros cœurs et destinées à des amateurs avertis tant sur le plan financier qu’au niveau du pilotage.
Aujourd’hui, la cadette de la famille Monster 1200 se refait une beauté et revient sous l’appellation Monster 1200S. Avec 150Cv et 126 Nm pour un poids de 211Kg, ça commence à causer sévère comme disait l’autre dans le film. Oui, mais il y autre chose dans la vie que les chiffres et Ducati l’a parfaitement compris en revisitant la Monster 1200 S. Elle s’est dotée de tout ce qui se fait de mieux en matières d’aides à la conduite, de suspensions, de freins ; rien n’est trop beau pour la princesse. Sa grande sœur la Monster 1200R développe encore 10 Cv de mieux et se révèle meilleure sur la piste mais ne se livrera qu’aux plus performants d’entre nous. Pour le commun des motards, la nouvelle Monster 1200S est un roadster au superlatif, bourré de tout. Passer une semaine en sa compagnie fût un grand moment de joie, de souffle coupé, de sourires sous le casque, de gros coups de gaz et de pur bonheur motocycliste. Embarquez donc pour le compte-rendu de cet essai qui n’aura point laissé sa chance à la monotonie….
Pour commencer, prenons quelques instants pour examiner le look de cette Monster 1200S. On revient ici vers une approche du concept original responsable du succès de cette moto. A savoir, un gros moteur, un réservoir au dessin reconnaissable entre tous, une petite selle avec son capot couleur carrosserie, une grand guidon et deux roues.
En gros, pas de superflu quand aux pièces, on se contente de l’essentiel. C’est vite dit quand on sait que les premières Mostro avaient le cadre bardé de Tie-rap, que le faisceau électrique se baladait partout. La Monster 1200S cuvée 2017 apporte une finition jusque-là inhabituelle, point de disgracieux câbles traînant ci et là.
De superbes caches répartis entre les tubes du cadre entretiennent ce sentiment de haut degré de finition ; Un vrai bond en avant. Les ajustements sont au niveau du prix et le réservoir pour marquer encore plus sa filiation avec « Il Mostro » conserve son typique clips de fixation, grâce auquel on lèvera toujours et encore le réservoir pour effectuer les opérations de maintenance sans tout devoir démonter, du moins celles les plus basiques car pour les entretiens plus poussés, un démontage en règle s’imposera encore. Ces entretiens s’espacent aussi plus que par le passé, tous les 15.000 km en intervalle.
Les jantes en alu forgé sont sublimes, le monobras arrière renforçant la vue sur le cerceau peint ici en noir et labellisé de rouge. Dommage que les silencieux gâchent cette vue en empiétant sur une partie de celle-ci.
La grosse fourche siglée öhlins apporte son côté imposant et rassurant pour la partie avant, impression de force augmentée avec son garde-boue avant court en carbone mat et soulignée par les larges épaules faites par l’imposant et nécessaire radiateur de refroidissement liquide.
La qualité des peintures renforcent ce sentiment de possession d’un bel objet, à côté du traditionnel rouge se trouve un gris vernis plus classe mais tellement moins passionnel. Un point fort pour l’égo du pilote qui se trouvera perché sur une monture se comportant comme un aimant à regards.
Le moteur lui n’est pas en reste niveau des performances. 150Cv et 126 Nm de couple. Le bloc Testastretta 11° de 1198cm3 (aux normes euro4 bien entendu), est un régal à l’usage. Ducati a compris le bon usage des aides électroniques et offre ici un moteur performant mais qui contrairement aux aînées de la famille se laisse dompter en fonction du mode choisi. Urban, touring, Sport sont les 3 choix possibles. En mode Urban, la douceur amenée surprendra les possesseurs de modèles antérieurs. A partir de 2500T/Min, fini les cognements et les grognements réprobateurs.
L’évolution en ville se fera en 3ème ou 4ème vitesse avec beaucoup de souplesse. Les jours de pluie ne seront plus sources de frayeur à la moindre remise des gaz. Bravo à Ducati sur ce coup-là. Le mode Touring apporte son lot de sensations, les aides laissent parler le moteur plus ouvertement et si vous maintenez le moteur au-dessus de 5000T/Min, accrochez-vous aux branches du guidon, serrez le réservoir entre vos cuisses, le paysage va se mettre à défiler en mode rapide. Cela reste toutefois accessible et c’est le mode le plus souvent utilisé lors de notre test pour sa grande homogénéité.
Si vous vous sentez l’âme d’un aventurier, qu’un Warrior sommeille au plus profond de vous, basculez donc en mode Sport : le bloc lâchera la meute de Cv avec la hargne d’un Mike Tyson des grands jours. Votre pneu arrière en subira les conséquences inévitables, vos talents de pilote seront mis à rude épreuve mais la dose d’adrénaline se répandant dans vos veines sera une récompense inoubliable. On pourrait argoter ici sans soucis : les yeux au fond du casque, les bras qui s’allongent, la claque dans la tronche ou encore le célèbre « coup de pied au cul », tous ont ici raison d’être. Waouaw, quelle patate, quelle rage, quelle force ! A voir la tronche des pneus, je crois qu’une rallonge de budget devra être allouée en cas d’usage fréquent de ce mode.
C’est bien beau d’avoir des bourrins, il faut pouvoir les exploiter, mon bon Monsieur. Oui, pas de soucis dans le cas de la Monster 1200S. D’abord, les suspensions öhlins fournissent un travail exemplaire pour garder la moto plaquée au sol. Seul, un amortisseur de direction serait le bienvenu pour museler les rares tentatives de la roue avant de décider de par elle-même de son chemin. L’amortisseur arrière du faiseur suédois remplit son office avec la bienveillance qu’on lui connait. Les plages de réglages offertes par cet ensemble de suspensions hautes performances imposent d’appliquer des modifications en toute connaissance de cause. Notez les réglages de départ, tant de possibilités s’offrent à vous et il ne sera pas difficile de se fourvoyer entre cette foison de clics.
Encore mieux, les différentes aides électroniques embarquées ici d’office et non pas en option, se révèlent parfaitement ajustées à l’usage possible du Monster : DWC,DQS, centrale IMU,ABS, DTC,ENG…Toutes ces aides sont présentes dans le différents choix de menu mais peuvent encore s’affiner une par une en détail pour obtenir une Monster 1200S réglée selon le moindre de vos souhaits. Soirée lecture en vue pour celui qui voudra tenter cette opération mais le gain qui en découlera en vaut la chandelle.
Décortiquons brièvement ces différentes aides et leur dénomination parfois inconnues au commun des motards.
DWC : Ducati Wheeling Control : empêche totalement le wheeling ou le tolère légèrement en fonction du niveau choisi.
DQS : Ducati Quick Shifter : permet le changement de rapports sans toucher à l’embrayage en montant comme en descendant les vitesses. Ne fonctionne parfaitement qu’avec le moteur au-dessus de 5000T/Min sinon des à-coups dans la conduite se font ressentir.C’est assez désagréable et en ville, il vaut mieux recourir à l’excellent embrayage et à son levier Brembo Radial.
ABS : Anti Blocking system : désormais standard sur les motos, il est ici associé via la centrale IMU, à un gyroscope qui détermine la position et l’angle de la moto et interagit avec le freinage pour conserver la moto en ligne en toute circonstances.
DTC : Ducati Traction control : contrôle de traction déjà présent sur d’autre modèles de la gamme, paramétrable en plusieurs positions. Super sur routes grasses ou mouillées, le DTC vous libère l’esprit et vous permet de rouler serein dans ces conditions.
ENG : gestion de la sortie puissance moteur, c’est une sorte de rhéostat qui gère la façon dont sont délivrés les chevaux du moteur, plus haut ou plus bas dans les tours et avec plus ou moins de rage. Finalement, cette aide est loin d’être superficielle, elle vous permet de rouler en ville avec beaucoup moins de très désagréables à-coups et vous offre toute l’explosivité du moteur en mode sport.
Niveau ergonomie, il y a encore un peu de travail pour faciliter l’utilisation de ces aides, une bonne lecture du manuel s’imposera. Dommage, d’autres marques européennes arrivent à rendre toutes ces aides accessibles sans aucune difficulté. Cela reste un détail mais quand même, la navigation dans les menus pourrait être plus simple.
Le cadre typique des Monster est toujours présent, l’association des tubes et des platines se révèle efficace bien qu’une tendance au délestage en cas de sortie de virage sur les gaz tendra à calmer les ardeurs du pilote. Reconnaissons que 150Cv à pleine charge sur le 3ème rapport mettront à mal pas mal de châssis de motos. La pose d’un amortisseur de direction sera l’alliée du pilote amateur de virages à rythme soutenu. Dommage qu’à ce prix-là, cela reste une option.
La signature optique de cette Monster 1200s est bien réelle. Le phare avant n’est plus le bol rond des Nineties mais un ensemble d’ampoules et de leds apportant une signature visuelle propre et reconnaissable. La Monster 1200S se voit de loin et éclaire enfin bien. Les leds du feu arrière offrent une visibilité de votre moto par les autres usagers de la route associée à un beau look. Les Warnings de série sont un plus pour votre sécurité bien que devenus communs sur les motos.
Le tableau de bord TFT multi couleurs se pose comme une belle référence du genre. Il est simple mais complet, les niveaux d’éclairage en fonction de la luminosité apportent un confort de vision au pilote. La taille des informations du display permettent une lecture facile et précise. en fonction du mode choisi, les informations affichées diffèrent, sympa comme idée.
Les freins sont issus du catalogue Brembo. Gros étriers radiaux à l’avant pour planter des freinages de bûcheron et, agréable surprise, le frein arrière Brembo se révèle être plus qu’un simple ralentisseur. Les commandes se font via des maîtres cylindres radiaux Brembo. L’ABS veille au grain sur tout ce petit monde. Pris à pleine main sur un freinage d’urgence, l’arrêt fût court et violent bien qu’efficace mais surtout apporta la découverte au pilote de la célèbre figure dite du « Stoppie ». 2 doigts suffirent à faire lever la moto, impressionnant de puissance et chapeau aux excellent Pirelli Supercorsa 2 pour le travail délivré.
La position de conduite est ici étudiée pour apporter un confort de conduite et offrir au pilote la possibilité d’effectuer de longues balades au guidon de cette Monster 1200S. Le réservoir affiné (contenance 16.5L) et la selle bien dessinée pour le pilote permettent au maître des lieux d’espacer les poses lors de balade, à raison de +/-250km d’autonomie selon votre conduite. Le grand guidon penchera votre buste vers l’avant certes mais de façon raisonnable. A vous les joies de longues journées de moto, chose inconnue avec les anciennes Monster.
Le transport d’un passager se fera ici sans trop de douleurs mais il faut savoir que la selle arrière de la Monster 1200S reste petite, plate et peu rembourrée. Les repose-pieds hauts placés plieront fortement les jambes du passager si celui dépasse le 1.65m sous la toise. Place d’appoint alors ? Non, elle offre plus que cela mais la Monster 1200S n’est pas une Multistrada sur ce point. A savoir lors de l’achat pour ne pas être déçu ensuite.
Elle est partie, s’en est retournée chez l’importateur qui la filera à un autre essayeur. Un brin de mélancolie est apparu lors du retour vers la maison au guidon de ma fidèle monture. Les Ducati Monster ont toujours suscité de l’engouement au sein des motards aimant les motos de caractère. Ils en parlent avec respect, amour et un brin de mauvaise foi parfois aussi. Cet essai s’est fait sous le soleil, sous la pluie, en ville, dans la campagne et un peu sur autoroute. La Monster 1200S s’est affranchie de tout ça sans problème, elle a offert de bons moments de moto. Elle a su rendre les navettes quotidiennes agréables, la balade arsouille du week-end mémorable et sa compagnie adorable. Pan dans les dents, elle a touché au cœur. Cette Monster 1200S a atteint l’âge de raison, sacrifiant un peu (vraiment un peu) de son caractère pour se rendre plus docile. Elle s’est embourgeoisée au niveau des aides de conduites, bienvenues lorsque l’on cherche à tirer la quintessence d’un tel bloc moteur. Elle offre son gros cœur à celui qui osera le conquérir, laissez votre égo au garage. Restez humble et avec de la patience ainsi que de la volonté, elle vous enchantera, sera toujours aussi exigeante niveau entretiens et consommables mais bon, comme le dit l’adage : « Quand on aime, on ne compte pas ! »
C’est effectivement mieux dans ce cas-ci car à 16.690€, l’amour a un prix. Mais elle vous le rendra bien!
Ciao bella….
Lolobadboy