La Ducati Multistrada 1200 passe le flambeau à sa soeur la 1260. Evolution ou Révolution ? 64 cc de plus et 2 cv de moins changent ‘ils la vie ? Examinons cette mouture 2018 en version Pikes Peak de surcroît…
Pikes Peak, c’est quoi ce truc ? C’est une course comme seuls les américains savent le faire, elle se déroule chaque année dans le Colorado sur la montagne de Pikes Peak bien évidemment. Longue de 19,93 km et dotée de 156 virages, son départ se situe à l’altitude de 2865 m et l’arrivée à 4305 m d’où son surnom de course vers les nuages. Depuis 2012, le parcours est entièrement goudronné mais reste glissant suite à l’importante présence de poussière sur l’asphalte. Bruno Langlois avait offert à Ducati quelques belles victoires dans cette course et l’usine a fini par s’y engager de façon officielle. Cette année encore, la victoire revient à la Multistrada pilotée par Carlin Dunne avec un écart de 0.8 secondes avec le second. L’interview du pilote sud-Africain est une ode à la Multistrada sur un parcours particulièrement difficile où plus de 25% de l’asphalte n’offrait quasiment aucun grip.
Ducati surfe donc sur cette vague de victoires avec une déclinaison Pikes Peak présente au catalogue depuis quelques années maintenant aux côtés de ses sœurs Plus orientées tourisme, rapide le tourisme certes, mais quand même plus adaptée que la Pikes Peak qui est définitivement une version sport. Voilà pour votre culture générale, je vous laisse contempler l’effet de ce discours auprès de vos amis ébahis lors d’un drink après balade et/ou arsouille, cela pose un homme ! 😉
La nouvelle Multistrada 1260 Pikes Peak fait comme ses sœurs (standard, S et D-Air), elle s’équipe du bloc moteur de la X-Diavel. Celui-ci cube 1262 cc, offre 158 cv à 9500 T/Min avec un couple de 129.5 Nm à 7500 T/Min. Chose étrange, ce bloc perd 2 cv (vous ne le sentirez pas) mais gagne un agrément de conduite inconnu à ce jour. 85% du couple est disponible dès 3500 T/min. Petite information amusante, à partir de 4000 T/min, vous piloterez le trail sportif le plus couillu du marché, c’est dire. En effet, personne ne le surpasse dans ces valeurs de couple. Quand vous sortirez d’une courbe sur le troisième rapport et que vous ouvrirez les gaz en grand en mode sport, prévoyez de porter un protège dents tellement le guidon va vouloir vous sauter au visage, vos bras vont se tendre et le virage suivant va vous tomber dessus bien plus vite que prévu. Que dire sinon que c’est le pied à chaque sortie en mode sportif. Un boulet de canon ou plutôt un missile sol-sol cette 1260 Pikes Peak.
Rouler vite c’est bien, encore faut- il tenir la route. Sur cette déclinaison Pikes Peak, la 1260 s’offre les services de la prestigieuse maison Ohlins, rien que ça. Fourche inversée de 48 mm à l’avant dotée de tout ce qu’on peut attendre comme réglages sur un tel matos. Pour l’arrière, rien de tel que le fameux amortisseur TTX36 du même faiseur.
Du caviar pour l’amateur de belles pièces et fan de technologie. Un cauchemar pour celui qui va s’empêtrer dans les réglages étendus proposés par cette suspension de course. Prenez un carnet et notez prudemment les valeurs de suspension avant d’y changer quoi que ce soit, sinon bonjour la prise de tête et la perte de précision. Ici, point de DSS (Ducati Skyhook suspension) électronique, c’est un choix clairement assumé par la marque de Bologne. Les suspensions offrent un débattement de 170 mm devant comme derrière.
Les freins aussi sont du top matériel et qui d’autre à part l’habituel fournisseur maison Brembo aurait pu s’y coller. Étriers radiaux monobloc 4 pistons M50 et disques de 330 mm pour l’avant, secondés par un étrier 2 pistons flottant mordant un disque de 265 mm pour l’arrière. ABS à bord et équipé de la fonction Brake cornering qui gère votre freinage sur l’angle au plus haut niveau d’efficacité.
Juste pincer le levier avec l’index et la moto se plante avec force dans l’asphalte. Juste bluffant !
Pour contenir cette profusion de cv et tenir l’ensemble sur la route sans occasionner des sueurs froides au pilote, le châssis Ducati se compose toujours d’un cadre treillis en acier cher à la marque.
Angle de chasse augmenté d’un degré (de 24° à 25°), empattement rallongé de 56 mm, bras oscillant prenant 48 mm au passage, toutes ces données indiquent la ferme intention d’apporter une stabilité nécessaire à la bonne conduite de ce vaisseau spatial, pardon, de cette moto sur-motorisée. Les 6 kg perdus par la version Pikes Peak jouent leur rôle aussi. Les magnifiques jantes forgées en alu sont de la partie pour réduire le poids non suspendu, les dimensions des pneus sont de 120/70/17 pour l’avant associé à un 190/55/17 pour la roue arrière.
La dotation en pneus est fournie par la maison Pirelli au travers de ses Scorpion Trail 2, de la vraie glue. Au vu de la puissance à faire passer au sol et de la conduite adoptée pendant notre essai, il faut avouer que je ne donnais pas cher de leur peau à ces Pirelli’s… Que nenni, ils ont assuré et même si quelques légères amorces de glissade de l’arrière sont apparues en sortie de courbe sur une relance vigoureuse (et c’est peu dire), ils sont restés très prévenants et ont fait preuve d’endurance sur la semaine d’essai. Il ne faudra pas hésiter à chausser votre Multistrada à l’identique lorsque le moment douloureux du remplacement sera venu. Il va falloir un sacré budget au vu des capacités de la 1260, elle risque de manger de la gomme aussi vite qu’Obélix avale un sanglier.
L’électronique embarquée est ici un vaste paragraphe. Ducati a rejoint et même surpassé BMW dans l’art de truffer ses motos d’électronique au travers d’assistances variées et multiples. Trop d’assistances me direz-vous ? A voir est ma réponse. Il faut juste prendre conscience avant de les détailler que toutes ces assistances ont pour but de faciliter la conduite de cette moto surpuissante, de renforcer la sécurité du pilote et du passager, de rendre l’usage au quotidien de cette 1260 Pikes Peak presque aussi simple que celui d’un scooter. Les réfractaires au progrès y verront d’innombrables sources de pannes, les progressistes y verront enfin la possibilité de rouler sous la pluie sans serrer les fesses du départ à l’arrivée. Il y a quelques années, on critiquait l’ABS. Aujourd’hui, on ne peut plus s’en passer. Alors oui, les assistances sont nombreuses et certaines parfois pas indispensables mais elles ont le mérite d’exister et Ducati en tant que marque Premium en dote richement ses motos, dont acte.
Ride-by-wire, DQS (Ducati Quick Shifter), ABS cornering Brake by Bosch, VHC (Vehicle Hill control) DTC (Ducati Traction control),DWC (Ducati Wheeling control), écran TFT, connectivity Bluetooth, Ducati Link App, rien ne manque à bord. Si vous paramétrez toutes ces assistances de façon convenable, vous roulerez sur une moto qui communique, freine en toute sécurité même en virage, ne peut plus faire de Wheeling involontairement, démarre en côte sans caler ni reculer et ne dérape presque plus en sortie de virage sur route mouillée. Il ne va pas être possible ici de détailler en profondeur ces assistances qui en plus, existent déjà depuis un bon moment sur les motos de la marque Transalpine.
Je vous invite à surfer sur le très détaillé web site de la marque ou de vous rendre chez votre dealer qui se fera un plaisir, après avoir avalé un Dafalgan, de répondre à vos moindres questions à ce sujet. Sachez que ces modes se paramètrent via une commande au guidon gauche, de façon super intuitive et que le grand écran TFT se montre lisible et que tous ces réglages y apparaissent de façon claires et simples à assimiler, contrairement aux dizaines de possibilités de réglages offertes par les modes PERSO.
L’APP Ducati Link est aussi un moyen pour communiquer avec la marque et de répondre aux invitations pour les événements qui vous sont accessibles une fois rentré dans l’univers Ducati. Geeks Welcome !
Le look de la 1260 Pikes Peak est assez semblable à celui de la 1200, seuls les feux arrières ont été modifiés. La décoration reste tricolore mais ici, le blanc prend de l’ampleur et même si cela reste très racing et dynamique, notre préférence va à la décoration de la version 1200 Pikes Peak. Enfin, les goûts et les couleurs ne se discutent pas … Seule certitude, Ducati n’a pas lésiné sur le carbone, cette matière qui rend fou tout amateur de moto sportive et la 1260 Pikes Peak s’en voit richement pourvue.
Un régal pour les pupilles, la voir scintiller sous les rayons du soleil donne déjà l’envie de la chevaucher sans avoir encore démarrer le moteur car là aussi, les mateurs vont se régaler de la bande son. Termignoni pose ici une ligne complète sur la 1260 Pikes Peak et il faut admettre que la musique sortant de cette ligne ne pourra que faire frissonner l’amateur, un gros bicylindre qui chante au travers d’une ligne d’échappement pareille, c’est de l’art.
Le saute vent en carbone est lui assez surprenant. Au premier abord, vu son design, il y avait des doutes d’émis sur son efficacité. Au bout d’une semaine, il faut lui présenter des excuses car il fait le job, se règle en hauteur toujours aussi simplement et offre grâce à de très intelligentes et bien disposées découpes, une protection bien supérieure à ce que l’on espérait au premier contact.
Les feux avant sont toujours full Leds et disposent de la fonction Adaptive virage, autrement dit, ils s’allument en plus lors de la prise d’angle ; au plus vous prenez de l’angle, au plus de Leds s’illuminent et les bas-côtés s’éclairent. Pas mal pour la sécurité.
Bon, assez de discours techniques, passons enfin aux choses sérieuses. La semaine a filé comme une Ducati, c’est dire. Cette Multistrada 1260 Pikes Peak est une terrible moto de sport déguisée en moto de tourisme. Sur la route, la position est confortable, vous êtes assis bien droit, le regard posé au loin bien au-dessus des voitures.
Le grand guidon permet un guidage de l’avant sans aucune résistance. L’excellent châssis maison associé aux suspensions et freins autorisent une conduite des plus dynamiques. Le moteur propulse l’ensemble très rapidement à des vitesses hautement répréhensibles et avec un sentiment de ne jamais vouloir s’arrêter ni de manquer de puissance.
Il est bluffant de voir la facilité avec laquelle on peut rouler vite et avec ce sentiment de sécurité au guidon de cette 1260 Pikes Peak.
Le confort à bord est royal pour les occupants, pilote comme passager sont choyés, vos fessiers vous remercieront et une journée de moto n’entamera en rien la bonne humeur de votre passagère. La protection au vent est plus que correcte comme indiqué plus haut dans l’article et les longs kilométrages ne vous effrayeront pas.
Enfin une Ducati avec laquelle voyager redevient un plaisir.
Les intervalles entre les entretiens passent à 15.000 Km ou 1 entretien annuel, votre budget s’en portera mieux si vous êtes un gros rouleur. Attention que, comme toute machine de sport pointue, un entretien méticuleux et donc coûteux sera nécessaire au bon fonctionnement de l’engin. Un Ducatiste averti en vaut deux…
Pour finir, que lui reprocher ? De façon cartésienne, son prix : 25690€ ce n’est pas rien, à ce niveau de tarif, la concurrence est rude et le moindre manquement coûte des points dans la bagarre. Certains détails de finition tels que câbles pas biens isolés ou quelques colliers apparents donnent un léger goût amer à l’addition. Au niveau des sentiments, on s’en fout, cette 1260 Pikes Peak est juste une terrible machine à plaisir, seul ou à 2, sur route comme sur circuit. L’enfourcher et partir rouler procure une dose de fun dans votre vie à nul autre pareil. Attention cependant à garder votre permis de conduire, car les vitesses souvent involontairement atteintes vous conduiront probablement à un retrait de celui-ci. J’avoue avoir surveillé ma boîte aux lettres avec peur les deux semaines suivant cet essai…. Mais ma bonne étoile et mon incroyable sens de la raison ont eu raison des risques encourus (je dis ça parce que ma femme lira aussi cet essai certainement) ; En bref, une merveilleuse moto, bardée de la meilleure technologie du moment, d’un moteur de feu exploitable au quotidien et surtout d’une gueule de tueuse….
In love,
Lolobadboy
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