Ce n'est peut-être pas encore révolutionnaire, mais MotoGP 19 apporte quelque chose aux opus précédents et justifie ainsi pleinement son existence. Toute la différence, ou presque, c'est Anna qui la fait...
Anna n'est pas une personne mais l'acronyme de Artificial Neural Network Agent, c'est-à-dire une intelligence artificielle (IA) de dernière génération. Les gens du studio milanais Milestone, qui s'étaient fait connaître à l'origine en développant l'excellente série des SBK, n'ont pas conçu Anna eux-mêmes; ils ont eu l'intelligence -et le budget!- de s'adresser à une start-up italienne qui conçoit des IA pour l'industrie et le domaine médical. Le résultat, après deux ans de collaboration, c'est un jeu qui marque une rupture avec ses prédécesseurs et dont les progrès sont indéniables.
Le mieux
Ces dernières années, la topographie des circuits avait déjà progressé; à titre d'exemple, le dernier gauche de Valencia, celui qui vous ramène sur la ligne droite des stands, est enfin une montée suivie d'une descente, comme il l'est dans la réalité. Mais, pour un habitué des jeux de motos, il faut convenir que le comportement prévisible de vos adversaires, ou le fait que vous êtes le seul à faire des erreurs alors que les autres peuvent virtuellement tout se permettre, peut s'avérer hautement frustrant. C'est précisément le champ d'action d'Anna qui rend vos adversaires capables de réagir en fonction des choix que vous opérez: ils sont désormais capables de modifier leurs trajectoires et d'apprendre de leur erreurs car, cette fois, eux aussi "vont parfois à la faute", comme on dit dans le milieu. Voilà qui les rend plus convaincants, on pourrait même dire plus "humains"; un peu comme si on se frottait à de vrais pilotes. Et le réalisme du jeu en profite évidemment à plein. Ce n'est pas encore parfait, il reste encore des pilotes qui font les mêmes gestes au même moment, mais cette tare bien connue n'est plus la norme et les pilotes s'adaptent maintenant aux conditions de course et à votre comportement en temps réel. Il y a des moments où c'est carrément bluffant.
Anna n'est cependant pas la seule à nous faire vibrer dans ce MotoGP19; on les attendait depuis belle lurette, ils sont là: les pilotes légendaires et leurs exploits s'offrent à vous dans un mode dédié riche de quatre catégories (Héros des 500cc, Aube du MotoGP, Grandes rivalités et Ere moderne). Vous pouvez ainsi revivre l'avènement du Doctor, celui du regretté Marco Simoncelli des exploits de Wayne Rainey voire de Max Biaggi. Vous le voyez, il y a là de quoi largement raviver l'intérêt des amateurs, surtout qu'une 500 2-temps se maîtrise moins facilement que les 4-temps actuels.
Dans la veine des découvertes propres à ce nouvel opus, on retrouve naturellement la E Moto World Cup et il est plaisant d'en découdre en incarnant Xavier Siméon au guidon de ces motos électriques dont la sonorité et la faculté d'accélération due à l'absence d'inertie sont également fort bien rendues. On peut aussi citer la présence d'un éditeur graphique bien venu en termes de personnalisation.
Le passable
Jusque-là, MotoGP 19 mérite quasiment un plébiscite; restons impartiaux et voyons les aspects où le jeu stagne. Il y a par exemple son mode Carrière. Supposé être le mode jeu le plus immersif donc le plus prenant, il ne l'est que dans la mesure où il permet de vivre intégralement le week-end de course et la saison des essais libres du vendredi au podium du dimanche. Mais pour le reste, cela paraît tiré en longueur et, finalement assez peu passionnant (on pense ici à la relation avec l'équipe technique qui se limite en réalité à un ensemble assez fastidieux de questions et de réponses toutes faites.)
Et puis, il faut reconnaître qu'en dépit de l'utilisation de l'Unreal Engine 4, un moteur graphique qui fait un malheur sur d'autres jeux, MotoGP 19 n'apporte aucune claque visuelle. C'est beau, mais ce n'est pas exceptionnel et les alentours des circuits, comme le public d'ailleurs, peinent à rendre l'impression foisonnante qui se dégage d'une vraie course. Là aussi, Anna pourrait prendre les choses en mains pour améliorer la situation et accentuer le sentiment d'immersion. Peut-être sera-ce le cas dans les années à venir.
Le bilan
Pour ces jeux à cadence annuelle, il nous est arrivé d'écrire plus d'une fois que, si vous possédez le millésime précédent, il est inutile d'acheter le nouveau. Eh bien, ce n'est pas le cas pour MotoGP 19 dont le gameplay est pertinent et qui profite pleinement de l'apport d'Anna et de celui du mode "Légendes". Les différentes configurations le rendent accessible tant aux débutants qu'aux joueurs expérimentés et, pour les vrais motards/pilotes, se frotter au pilotage sans assistances et avec boîte manuelle est toujours un sacré défi. Notons pour terminer que les modes de vue "cockpit" nous ont semblé plus réalistes que précédemment.