Quand on a vu les premiers prototypes du Niken, on s'est demandé ce qu'il pouvait bien passer par la tête des ingénieurs de Yamaha pour vouloir développer une moto MP3. Mais si, le scooter trois roues qui connait en France un succès phénoménal depuis sa sortie. Et finalement, le Yamaha Niken est arrivé en production accompagné en plus par une version GT. Il gagne ainsi une bulle haute, des poignées chauffantes, une selle confort, des valises, une béquille centrale et 2 prises 12V.
Quelle idée saugrenue quand-même ! Ajouter une roue avant à une moto et en plus en partant d'une MT-09, le pari est osé. L'objectif est bien entendu d'augmenter la sécurité en lui donnant un train avant qui devrait coller au sol et rassurer sur tous les terrains et conditions climatiques. Voyons avec cet essai ce que donne cet engin qui semble sorti d'un autre monde.
La vidéo de l'essai du Niken GT :
A l'avant on ne peut pas rater qu'on a un Niken entre les mains, 4 tubes de fourches, deux par roues de 15 pouces et un train plutôt large puisque la largeur entre les roues dépasse les 40 cms. Sur les suspensions, on trouve des épaules larges comme des passages de roues de voiture sportive. Juste au dessus, des phares qu'on pourrait retrouver sur la R1 et ça, sous une bulle haute avec des rétroviseurs profilés qui intègrent les clignotants. Ah oui, c'est spécial, je vous l'accorde et j'en entends déjà crier au scandale.
Derrière, c'est déjà plus normal pour un motard, un bon gros réservoir au dessus du moteur, deux belles selles et une roue arrière en 17 pouces. Un porte bagage pouvant accueillir valises et top case vient se placer derrière la selle arrière et offre des poignées de maintien assez grandes. Le feu arrière et les clignotant prennent place derrière la coque alors que la plaque descend sur un bras derrière la roue.
Devant le pilote, un guidon d'apparence classique avec les commodos habituels : à droite le sélecteur de mode de conduite, à gauche le régulateur de vitesse et un bouton pour naviguer dans les menus. Le tableau de bord n'est pas nouveau, un fond noir avec un affichage entre blanc et gris pour avoir toutes les informations : compte-tour, jauge, rapport engagé, TCS (contrôle de traction) et modes de conduite (3 niveaux).
Je ne vais pas vous passer tous les détails techniques sur le système, je vais plutôt vous parler de mon feeling. Chacun sa façon de voir mais vous sortir tous les termes techniques et étaler encore plus de confiture sur ma tartine, perso, je préfère la manger quand elle est prête.
Je m'installe au guidon ; la vue est étrange, c'est large là devant. Je relève la moto, elle accuse quand-même 267 kg. Et première surprise, du moins si vous avez déjà roulé avec un scooter MP3, il n'y a pas de blocage du train avant. Si je la lâche, elle tombe... gloups. Je tourne le guidon et la direction dite Ackermann fait bouger les roues avant (il vaut mieux quand-même) mais le ressenti est très différent d'une moto classique.
Un appuie sur le starter et le CP3 se met en route. Oui, c'est bien un CP3, 3 cylindres de 847 cc et ses 115 cv à 10.000 tours. On verra ce que ça donne en roulant.
Les premiers mètres se font un peu hésitant. Faut il pencher ? Conduire comme ces scooters et à partir d'une certaine vitesse rouler comme une moto ? C'est un peu le bordel dans ma tête sur les premiers tours de roues tellement j'ai des questions à son sujet. Parfois, il faut arrêter de penser et juste rouler. Et c'est bien ce que j'ai fait.
En ville, le Niken me semble un peu pataud. Ca passer partout, ça se moque des mauvaises routes mais à faible allure, je ne le trouve pas super vif au changement et la largeur n'incite pas trop à l'interfile bien qu'on peut le faire (si si, en Belgique, on peut). Au freinage par contre, on peut y aller, l'avant ne bouge pas. Les deux disques avant de 298 mm et le 282 mm sont rassurants et suffisamment mordants pour stopper l'engin. Mieux, je ne regarde plus forcément au sol pour éviter de freiner sur une ligne blanche ou une taque d'égouts. C'est rassurant. En agglomération, le CP3 ne pose évidemment pas de souci, on connait ses possibilités et son caractère pétillant.
Changement de mode et de terrain de jeu, je me lance sur les routes de campagne et là on retrouve la pêche du CP3, ça pousse bien malgré l'embonpoint pris à cause du train avant. Le rythme augmente et j'en viendrais presque à oublier que j'ai trois roues. Seule l'absence de repère visuelle me pose question, j'ai l'impression de pencher assez fort mais est ce que je penche vraiment... bonne question mais en vrai, le Niken semble collé à la route et le changement d'angle se fait assez facilement et instinctivement. Parce que oui, le Niken penche et le système autorise un angle de 45°, c'est déjà pas mal. Je passe les rapports à la volée avec le Quickshifter et je me retrouve vite à des vitesses peu recommandables. Ne cherchez pas, ce n'est pas dans la vidéo ! Le contrôle de traction jouera aussi son rôle, ce n'est pas un CP3 pour rien et avec un avant comme celui-ci, on risque même de le solliciter plus souvent, il a forcément moins tendance à s'envoler.
Je comprends ici l'intérêt des deux roues avant, même si une passe sur une bosse ou un trou, l'autre assure toujours un bon maintien, la tenue de route est ainsi améliorée. Vous pouvez même régler la suspension comme vous le voulez. Du coup, bien assis sur ma selle confort, planqué derrière ma bulle, je pourrais bien vider les 18 litres du réservoir en une seule traite. Avec un peu moins de 6 litres au cent, les étapes sont assez longues et ce n'est pas un souci.
Je ne vais pas dire qu'on ne doit plus regarder à l'état de la route, ça serait exagérer mais on sent nettement la différence, surtout sur des routes comme dans l'essai où on ne roule vraiment pas sur un billard. Là où habituellement on devrait ralentir ou slalomer entre les reliefs, le Niken ne semble pas gêné et la conduite reste stable. Par contre, on n'est pas non plus sur une grosse GT où on aurait l'impression de voler au dessus de la route. Vous sentirez les raccords transversaux comme sur une moto classique. En même temps, c'est normal, la suspension reste des tubes de fourche, en double ici.
La version GT étant en plus équipée de valises voir même d'un top case, elle peut vite se montrer idéale pour les longs week-ends ou les vacances en trois roues. Il faut dire qu'on est bien assis, le régulateur bien utile sur des longues portions, la protection du carénage avant met bien à l'abri et on s'imagine vite partir en escapade même en duo.
Il ne faudra toutefois pas oublier qu'une fois complètement chargée, si vous devez la déplacer à pied, ça vous fera une bonne séance de muscu et contrairement à certains scooters trois roues, il n'y a pas de blocage du train avant, il faut donc bien tenir le guidon pendant les manœuvres.
L'essai était attendu, par moi en tout cas et je dois dire que je ne suis pas déçu. Il ne faudrait pas moins puissant que le CP3 sous peine de vite s'ennuyer et de trouver les reprises pénibles. Ici, il y a juste assez de chevaux pour une moto performante. Il ne faudra toutefois pas se leurrer, pour le moment, le trois roues reste marginal. Certains motards iront même jusqu'à dire que ce n'est plus une moto, d'autres auront peur de sa carrure et du poids, difficile de se faufiler entre les files du ring, le Niken préfère avoir de l'espace.
Et puis, il reste le prix : 16.299 € pour le Niken GT à comparer à un Tracer 9 GT à 14.499 €. Il faut avouer que le secteur touring chez Yamaha a pris chère sur les derniers catalogues avec la disparition de la FJR et de la Super Ténéré et pour voyager loin ou longtemps sur une moto de la marque au diapason, il ne vous reste que ces deux alternatives.