Le Ninja est de retour !
Depuis quelques générations, la ZX-6R marquait le pas en regard de la concurrence. Mais, sous l'impulsion de la Daytona 675, Kawasaki nous propose à nouveau une supersport de premier plan qui, si elle n'est pas parfaite, marque de gros points dans tous les domaines.
Faites comme nous et dégustez d'abord la ZX-6R avec les yeux. Sans conteste, sa plastique autant que sa finition inspirent le respect jusque dans le détail, a fortiori dans la version spéciale Performance que nous avons eue à l'essai, et qui se distingue de la version standard, moyennant un millier d'euros supplémentaires, par un capot de selle, une bulle double courbure, un kit de trois protections de réservoir et, last but not least, par un silencieux Akrapovic homologué que l'on peut obtenir en finition carbone ou titane. Ligne râblée, face avant agressive, coloris typiquement Kawa mais moins éculé qu'un bleu/blanc GSX-R, freinage, châssis et surtout bras oscillant maousses : la Ninja moyenne en impose (ben oui, maintenant, la Ninjette, c'est la deux et demie !) Il y a là une incontestable qualité perçue. Vous me direz que c'est bien le moins qu'on pouvait en attendre, puisque la 600 d'aujourd'hui coû.te le même prix que mon ex-ZX-10R 2005...
Méthodisme nippon
Depuis 2003 et surtout depuis 2005, les commentaires touchant aux ZX-6R convergeaient : de bonnes motos, efficaces, mais un peu lourdes à emmener et manquant de pêche, même dans les versions 636cc. Entre-temps, la Triumph Daytona 675, dopée par la trithérapie de son moteur, avait montré que le coffre à mi-régime n'était pas l'apanage des grosses cylindrées. Donc, en revoyant leur copie en 2009, les ingénieurs de Kobe étaient contraints de faire mouche. Et d'abord, il faudrait lutter contre le surpoids : entre 2008 et nos jours, la ZX-6R a perdu la bagatelle de dix kilos pour culminer à 191kg tous pleins faits. Une valeur qui, ajoutée à ses quelque 134cv en version libre, la replace tout à fait dans la course au podium de la catégorie. Et c'est du reste l'impression qu'elle donne une fois que l'on s'installe à ses bracelets. Comme de juste sur une 600, on se passe ici des assistances électroniques et des cartographies programmables . par contre, on a droit à la Big Piston Fork, à un anti dribbling et à un freinage tout radial agrémenté de disques wave. Avec les attributs additionnels de la version Performance, rien à redire, ça le fait !
En selle, on a tôt fait de remarquer que la ZX-6R reste logeable et n'impose pas à son pilote une position aux accents sportifs excessifs. C'est tout bénéfice pour la conduite sur route, puisque la Kawasaki peut, dans cet exercice et compte tenu de son orientation supersportive, être considérée comme une moto confortable. Par la position qu'elle induit, par sa sellerie, et par la bonne protection de la bulle endurance, c'est un fait . par ses suspensions, c'est moins clair, car l'épure de base rend la moto passablement sèche sur mauvais revêtements. Ses aspects pratiques sont, de toute évidence, limités à peu de chose : acquérez un cadenas microscopique si vous comptez le placer sous la selle passager. A l'inverse, on apprécie une instrumentation assez complète (il y a un chrono) et claire à défaut d'être originale. On aime aussi la belle efficacité des rétroviseurs et un éclairage qui assure plutôt bien en nocturne, surtout en plein phare. Pour couronner le tout, l'amortisseur de direction estampillé Ohlins vient parfaire l'impression de sérieux laissée par le poste de pilotage. Même si, à l'usage, il peine parfois à masquer la légèreté du train avant.
Légère et incisive
Le moins qu'on puisse dire de la ZX-6R actuelle est qu'elle tire profit de sa cure d'amaigrissement. Ses dix kilos de moins transfigurent littéralement le comportement de la Verte, qui s'inscrit désormais sans le moindre effort, avec neutralité et naturel, dans la moindre courbe. Certains de nos confrères ont mis en avant une trop grande nervosité de l'avant, occasionnant des mouvements de directions indésirables, comme ce fut le cas sur les premières R1. Ce n'est pas faux . d'ailleurs, en prenant les commandes de la ZX-6R chez l'importateur, nous fû.mes nous aussi surpris par la légèreté de la direction : ce guidon tourne aussi facilement que celui d'un vélo ! C'est donc avec une certaine circonspection que nous vî.mes arriver les premières courbes. A vrai dire, et vous vous en seriez doutés, c'est en sortie de courbe à l'accélération que votre roue avant peut en effet paraî.tre nerveuse : on durcit alors l'amortisseur de direction, mais il faut convenir que cela ne change pas grand-chose, et on se dit qu'il faudra passer par des réglages peaufinés des suspensions. Car bizarrement, avec ses réglages d'origine, la Kawa ne nous semblait pas spécialement équilibrée en raison d'un avant nettement plus ferme que l'arrière. En revoyant tout cela dans le sens d'une meilleure balance avant/arrière et en relâchant un peu la détente hydraulique, pour limiter le travail de la fourche sur les accélérations, tout est rentré dans l'ordre sur notre machine d'essai qui devint donc sereine en sortie de courbe comme elle l'était en entrée. Plus rien à redire dès lors sinon que l'amortisseur de direction continue de nous décevoir un peu, comme c'est le cas sur la ZX-10R 2011 également : même durci au maximum, il n'entrave que partiellement les mouvements du guidon. Remarquez, on reste tout à fait dans les limites de l'acceptable, voire d'un certain " fun ", mais venant d'un élément Ohlins, on attendait mieux.
Ces réglages validés, on peut dire que la ZX6-R fait un sans faute sur route. A l'instar de ce que nous disions plus haut, elle reste confortable et protège vraiment bien avec sa bulle double courbure optionnelle. On remarque aussi la suavité exemplaire de ses transmissions et, sur le réseau routier, la démultiplication retenue paraî.t idéale. Ce qui nous amène à évoquer le comportement moteur. Selon nous, c'est là que l'ingénierie maison a le mieux travaillé, dans la plus pure tradition des moteurs Kawa qui savent s'avérer démonstratifs. A ce point de vue, la ZX-6R fait bien mieux que la " 10 " essayée par nos soins deux semaines plus tôt. Voilà un 600 bien rempli qui marche (un peu) sur les traces du 675 made in England parce qu'il parvient à pousser relativement tôt tout en gardant une belle aptitude aux envolées lyriques à l'assaut de la zone rouge. Dès 3500rpm, le bloc s'éveille et vous gratifie d'une poussée en hausse ininterrompue jusque 10000rpm, régime auquel il explose sur encore cinq bons milliers de tours. On note juste une zone où l'injection tousse un peu et hésite sur la conduite à tenir, vers 9500rpm, mais ce n'est presque jamais gênant. C'est du beau boulot, et on prend plaisir à utiliser ce moteur au quotidien . pas plus puissant mais plus " rond ", et donc plus agréable, que celui d'une R6 par exemple. La Yamaha aura aussi tendance à consommer un peu plus que la Kawa, avec laquelle on restera sous les 7L/100km si on reste calme à son guidon. Ne manquons pas non plus d'évoquer le freinage, car l'accastillage retenu par Kawasaki pour sa supersport est sans doute ce qui se fait de mieux dans la catégorie : la ZX-6R freine réellement très fort, au point que chaque traction du levier droit s'avère très rassurante. Sur route, on a du reste la sensation qu'il reste toujours de la décélération en réserve. C'est d'autant mieux que le feeling n'est pas mauvais non plus. Bien sû.r, on aura intérêt à se méfier sur chaussée grasse, mais pas forcément plus avec une ZX-6R qu'avec une autre moto.
Odeur de paddock
Ce haut potentiel découvert sur route ne demandait naturellement qu'à s'exprimer sur piste, et là non plus, la ZX-6R ne déçoit pas. Evidemment, le " braquet " d'origine ne s'accommodera pas de n'importe quel tracé : il est conçu pour donner à la 600 suffisamment de vitesse sur des circuits rapides et des accélérations confortables sur route. Si vous montez sur un circuit étriqué avec des virages lents, comme c'est notre cas, vous risquez d'être pénalisé en sortie de courbe parce que vous ne savez pas quel rapport choisir. C'est le dilemme bien connu de tous les pilotes de 600 en config' d'origine : le rapport inférieur permet de bien sortir mais vous " scotche " au freinage, tandis que le rapport supérieur vous propulse bien jusqu'à la corde mais vous colle à l'accélération... Nous avons d'ailleurs eu l'opportunité de mesurer la différence avec un modèle 2010 aux rapports raccourcis qui donnaient à son pilote tout loisir de profiter du potentiel mécanique offert par la Ninja. Et là, elle décoiffe, la Verte !
A ce détail près, la ZX-6R vise le sans faute sur piste aussi. On note à nouveau que l'amortisseur de direction a un peu de mal à juguler les mouvements de direction mais, en dehors de cela, le travail de la fourche BPF est excellent en termes de stabilité et de " rendu " des infos au pilote. Comparativement à une fourche à cartouche de même taille, le diamètre du piston qui équipe cette version est quasiment double (37 mm contre 20 mm), ce qui multiplie presque par quatre la surface d'action de l'huile contenue dans la fourche. Notons que les réglages de compression et de détente sont placés au sommet de chaque tube de fourche et se gèrent facilement au moyen d'un simple tournevis, tandis que le réglage de précharge se trouve à la base et nécessite une clé Allen. De son côté, l'assistance à l'embrayage limite le couple de retour et jugule si bien les dribblings de la roue arrière que le sempiternel coup de gaz à la rétrogradation devient superflu. On n'omettra pas d'y ajouter l'excellente motricité assurée par le superbe bras oscillant et la rigidité en nette hausse assurée par le nouveau châssis. Si la structure de la poutre principale reste quasiment inchangée par rapport au modèle précédent, la rigidité a été modifiée au niveau de l'axe de bras oscillant et des supports arrière du moteur afin d'optimiser la répartition de rigidité avant/arrière. Le bloc-cylindres est maintenant plus incliné. En contournant l'arbre de sortie de boî.te, le centre de gravité du moteur a été relevé de 16 mm et la colonne de direction de 10 mm afin d'améliorer l'entrée de virage et les performances en courbe. Et ma foi, ça marche...Quant aux freins, tout le bien qu'on en pensait sur route se trouve encore mieux justifié sur piste : la puissance est sans appel, le feeling pas mauvais du tout et l'endurance au rendez-vous.
Bilan flatteur
Au moment de tirer les conclusions de cet essai, on ne peut que souscrire aux orientations retenues par Kawasaki pour repositionner sa supersportive par rapport à la concurrence. Certes, elle ne sera pas écrasée par la ZX-6R, mais elle devra désormais se battre avec brio pour être devant, ce qui n'était plus le cas depuis quelques temps. Et, en considérant en outre que la Kawasaki offre de très intéressants compromis en usage routier (confort préservé, agrément moteur), nous ne sommes pas loin de penser qu'elle peut viser haut sur le podium.(Sur les photos constructeur : ZX-6R Performance et ZX-6R Standard.)
Fiche technique
Moteur4 cylindres en ligne, 4-temps à refroidissement liquideCylindrée cm³.599 cm3Alésage x course67,0 x 42,5 mmCouple maxi60 N.m {6,1 kgf.m} / 11 000 tr/mnTaux de compression13,3:1Distribution2 ACT, 16 soupapesType d'alimentationInjection : 4 x Ø. 38 mm (Keihin) à double papillon secondaire ovale
AllumageélectroniqueLubrificationSous pression, carter humideTransmissionsBoite de vitesses6 rapports, extractibleTransmission finaleChaî.ne à joints en XRapport primaire1,900 (76/40)Rapport interne: 1 ère2,714 (38/14)Rapport interne: 2 ème2,200 (33/15)Rapport interne: 3 ème1,850 (37/20)Rapport interne: 4 ème1,600 (32/20)Rapport interne: 5 ème1,421 (27/19)Rapport interne: 6 ème1,300 (26/20)Rapport final2,688 (43/16)EmbrayageMultidisque en bain d'huile, à commande manuelle
Partie-cycleCadrePérimétrique en aluminium emboutiAngle de chasse/chasse24Ëš / 103 mmDébattement avant120 mmDébattement arrière134 mmPneu avant120/70ZR17M/C (58W)Pneu arrière180/55ZR17M/C (73W)Angle de braquage gauche / droite27Ëš / 27ËšSuspensionsSuspension avantFourche inversée de 41 mm avec ressorts additionnelsRéglage en compression: ProgressifRéglage en détente: ProgressifPrécharge du ressort: Entièrement réglable (0-15 mm)Suspension arrièreSystème Uni-Trak à tirant avec monoamortisseur à gaz, ressort additionnel et ancrage supérieur sur roulement à billesRéglage en compression: Progressif, deux gammes de réglages (vitesse rapide et lente)Réglage en détente: 25 positionsPrécharge du ressort: Entièrement réglable (5,5-15,5 mm)
FreinsFrein avantDouble disque en pétales semi-flottant de 300 mm (x 6 mm épaisseur)Deux étriers Nissin à 4 pistons opposés (aluminium), montage radial, 4 plaquettesFrein arrièreSimple disque en pétales de 220 mm (x 5 mm épaisseur)Simple piston Tokico en aluminium DimensionsDimensions (L x L x H)2 090 mm x 705 mm x 1 115 mmEmpattement1 400 mmGarde au sol120 mmHauteur de selle815 mmRéservoir17 litresPoids tous pleins faits191 kg
Importateur : Kawasaki Motors Europe Benelux BranchWest Point Park't Hofveld 6 C21702 Groot-BijgaardenTél. : 02/481.78.24
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