Fin 2002, Ducati présente un nouveau modèle baptisé Multistrada ou "toute route" en français. Equipée d’un 1000 cc, elle se déclinera par la suite en 620 dès 2005, 1100 en 2006 , 1200 en 2010 et 950 en 2017. Le bicylindre 4T en L, refroidi par air, simple ACT, 2 soupapes de 84 cv des débuts évoluera au fil des années pour devenir le V2 testastretta 11° de 937 cm3 à distribution desmodromique de 113 ch. Et pourquoi pas un V4 ? C’est chose faite puisque j’ai eu le Plaisir de tester la nouvelle Multistrada V4S.
Nouvelle mouture.
Pour cette nouvelle venue, la firme italienne a consacré trois ans au développement. C’est donc une nouvelle mouture de la Multi 4ème génération qui a vu le jour. Un V4 pour un trail routier, c’est d’autant moins courant que Ducati a doté son nouveau-né d’un monstre de 170 cv au couple de 125 Nm à 8.750 tours qui bénéficie d’un nouveau cadre en aluminium. Malgré les 2 cylindres supplémentaires, il est plus léger et plus compact que le V2.
La Multistrada V4 existe en deux versions, dont une avec jantes à rayons et pneumatiques orientés TT. Vu qu’elle est appelée à sortir occasionnellement du bitume, on se pose inévitablement la question : mais qu’ai-je à faire d’un V4 de 170 chevaux, qui plus est baptisé Granturismo, en off road ? Rassurez-vous ! Tout a été prévu pour rendre la bête la plus polyvalente possible grâce aux 4 mode de conduite (Sport – Touring – Urban et Enduro), à un poids contenu de 218 kg à sec et à une armada électronique que nous ne manquerons pas de passer en revue. Un moteur compact, léger et performant avec des valeurs de couple élevées. D’après Ducati, elle répond aux besoins les plus exigeants des "aventuriers", en offrant une parfaite combinaison de sensations fortes et de saveur sportive. Exit le sacro-saint système desmodromique cher à la firme de Bologne au profit d’une nouvelle distribution qui comprend un système de rappel des soupapes par ressort grâce auquel les intervalles d'entretien sont portés à 60 000 km.
Trois versions de la V4 sont disponibles. La version S est équipée d’un kit « Performance » qui comprend un échappement Akrapovic en titane avec embout en carbone, matériaux également présent au niveau du garde-boue avant. Quant à la version « Sport », elle se pare d’une décoration racing.
La multi s’est affinée. Le phare à LED effilé et les ailettes de refroidissement destinées évacuer la chaleur du moteur lui confèrent un look de requin. La partie arrière conserve le cadre treillis et est équipé d’un nouveau système d’accrochage des valises qui se révèle plus pratique à l’usage. Aussi bien à l’avant qu’à l’arrière, on remarque d’emblée une zone noire. Il s’agit du radar destiné à réguler la vitesse en fonction des véhicules qui vous précèdent et qui vous suivent. Peu esthétique, mais efficace ! Comme toujours, notons le souci du détail comme les clignoteurs intégrés dans le carénage, le sabot moteur profilé et une combinaison de teintes qui font de la Multistrada une véritable oeuvre d’art. Le côté pratique n’a pas été négligé. Un petit espace muni d’une prise USB intégré dans le réservoir permet de ranger facilement son smartphone et un autre situé sous la selle passager et équipé d’une prise DIN.
Difficile de faire mieux !
Venons-en à un autre point fort de l’italienne : un équipement parmi les plus complet du marché. Outre ceux déjà cités, la V4S est équipée
Des suspensions Marzocchi semi-actives et paramétrables - Des étriers de frein Brembo M50 Stylema sur des disques de 330 mm - D’un écran TFT couleur de 6,5 pouces particulièrement lisible et complet - D’un système de navigation GPS - Du système multimédia Ducati - D’un radar adaptatif - D’un détecteur d’angle mort intégré dans les rétros - D’une centrale inertielle IMU - D’un contrôle de traction - D’un ABS Cornering - D’un anti-wheeling - D’un anti-stopping - De l’aide au démarrage en côte - De l’éclairage en courbe - D’une signature lumineuse diurne - D’un shifter Up/Down - De commodos rétro-éclairés - D’un démarrage keyless - D’un arrêt automatique des clignoteurs - D’un degré de personnalisation élevé, y compris au niveau du moteur - De commandes rétroéclairées…en rouge comme il se doit !
En selle !
Une fois en selle, j’apprécie la position idéale du guidon, la largeur contenue du réservoir au niveau des jambes, la hauteur de selle réglable (840 mm), son confort et le grand écran TFT. Une surprise cependant : le nombre de boutons qui ornent le commodo gauche. Il faut bien rendre accessible toute cette technologie !
Une pression sur le contact et l’écran TFT s’anime. Pression sur le démarreur et le Granturismo s’ébroue avec la sonorité caractéristique de la marque italienne, même si le V4 l’adoucit quelque peu. Sur les conseils du concessionnaire, je débute en mode Travel, plus souple et agréable. Agréable, il l’est sans aucun doute comparé aux V2 bodybuildés de Ducati qui vous propulsent sur la route dans un vrombissement digne d’un départ de moto GP. Ceci dit, on retrouve l’ADN de la marque, mais avec moins de violence. Je ne peux donc résister très longtemps et passe en mode Sport. 170 chevaux pour moins de 220 kg, ça décoiffe…d’autant plus que les chevaux et le couple débarquent rapidement, mais sans arracher les bras, histoire de profiter de la puissance sans me fatiguer à maîtriser ma monture. Il faut également souligner l’excellent équilibre de cette moto favorisé par une répartition idéale des masses. Afin de parfaire cet équilibre, les ingénieurs ont poussé la minutie jusqu’à prévoir des valises mobiles. La mise sur l’angle est d’une facilité déconcertante et le rayon de braquage est surprenant pour une moto de ce gabarit. Pour les plus exigeants, il est possible de paramétrer chaque mode de conduite dans les moindres détails. Par exemple, il est possible de désactiver l'anti-patinage et l'anti-wheeling, de réduire l’action l'ABS sur la roue avant sans le supprimer, seul l'arrière peut l’être en mode Enduro. Le Shifter se montre collaborant, même s’il accroche parfois. Sur autoroute, la protection offerte par le pare-brise est suffisante ; toutefois, les grands gabarits apprécieront un déflecteur supplémentaire. Autre bonne surprise : la facilité de réglage dudit pare-brise à une main et en roulant.
En mode Urban, la cavalerie se calme sérieusement, ce qui n’est pas pour me déplaire. Avec davantage de couple disponible et de douceur, je peux évoluer dans le trafic urbain avec aisance.
Diabolique en mode Sport, le freinage signé Brembo est adapté à chaque mode de conduite.
Avec un réservoir de 22 litres, je m’attendais à une autonomie d’au moins 300 km. J’ai donc été fort étonné lorsque le voyant fatidique s’est allumé après 250 km, m’indiquant ainsi que la Multistrada n’est pas un modèle de sobriété avec une consommation de 7 litres.
Le régulateur adaptatif surprend quelque peu au début, mais il constitue un plus incontestable en matière de sécurité. Lorsque la distance entre la moto et le véhicule qui la précède atteint la valeur déterminée par le pilote, elle ralentit et freine en cas de danger. Autre fonction très utile : la détection de véhicules qui se trouvent dans votre angle mort. Si vous quitter votre trajectoire, le voyant s’allume, voire clignote si le danger est imminent.
La recherche de l'esthétisme jusque dans les détails.
Les suspensions semi actives paramétrables offrent un confort de premier choix. On peut même éviter de passer par le menu en sélectionnant le mode Automatique, et la moto s’adapte à la charge.
Même si elles sont nombreuses, surtout à gauche, pas besoin de relire le mode d’emploi trois fois afin de s’y retrouver . L’accès au menu et la gestion des multiples paramètres sont intuitifs. Et Dieu sait qu’ils sont nombreux. Ducati évoque 400 réglages possibles ! L’écran est particulièrement bien agencé et permet l’affichage de nombreuses données, dont l’état de chaque paramètre.
Même si beaucoup, dont moi avec une moto d’essai, hésiteront à mettre une machine de 30.000 € dans la caillasse, les aptitude de la V4S pour le off-road sont indéniables ; notamment en ce qui concerne le mode de conduite Enduro. Il bride le moteur et adapte les paramètres au type de revêtement. L’ABS est déconnectable au niveau de la roue arrière et limité au minimum pour l’avant. La position debout est excellente et on se sent en sécurité. Comme j’ai tout de même tenté une petite expérience off-road, la facilité avec laquelle l’italienne se pilote sur la route se retrouve dans les chemins.. Ajoutons que les Pirelli Scorpion Trail II sont prévus pour tenir le cap.
Le voyage en duo est une évidence avec cette moto. La selle à deux niveaux est confortable et peut être chauffée. Les poignées de maintien sont facilement accessibles et, à condition de disposer d’un top case, le passager pourra apprécier la beauté du paysage en tout confort.
Destinée au voyage, la Multi propose un Pack Travel composé de valises latérales aux couleurs de la moto ou aluminium, du radar, de la béquille centrale ainsi des selles et poignées chauffantes. Concernant les valises, celle de droite est fortement réduite à tel point qu’il ne faut pas espérer y mettre grand-chose. Progrès par rapport aux anciens modèles : déposer et replacer les valises est un jeu d’enfant.
La full option propose en plus le pot Akra et le garde-boue avant en carbone. Pour les amateurs de off-road, le kit enduro se compose d’un sabot moteur en aluminium, d’un pare-moteur en acier, de feux additionnels à LED, d’un protège carter d’huile, d’une protection de radiateur et d’une platine de béquille. Enfin, le kit accessoires urbains propose un top case et ses accessoires, un petit sac de réservoir semi-rigide et un rallonge d’alimentation avec prises USB. Si cela ne suffit pas à faire votre bonheur, la liste des accessoires vous comblera certainement. Il est également possible de se passer des kits et équiper la moto à sa sauce, mais il n’est pas certain que vous y gagnerez financièrement.
Prix.
Passons à présent à la caisse ! La V4 de base démarre à 19.690 €. La V4S monte à 23.390 € et la Sport à 27.790 €.
En configuration full options, la V4S est tarifée 27.740 € auxquels il faut ajouter 1.258 € pour le kit enduro et 654 € pour le kit urban (1.089 € pour la version aluminium). On atteint la coquette somme de 29.711 € ou 30.146 € pour la version aluminium. Notez que la version Pike Peaks est toujours dans le catalogue pour 30.190 € sans les packs !
En conclusion.
Elue moto de l’année par l’association de la presse spécialisée européenne, la V4 est une référence incontestable en matière de trail sportif. Bourrée d’électronique au service d’un moteur fabuleux, elle se veut polyvalente en offrant la possibilité de sortir de la route, ce qui, ne nous leurrons pas, n’est pas sa vocation première. Routière avant tout, son équilibre général et la facilité avec laquelle elle s’apprivoise sont doublées d’un confort à la hauteur de son prix. Son look de prédateur contribue si besoin est à confirmer son bouillant caractère. Le V4 Granturismo se montre (très) puissant lorsque c’est nécessaire, mais peut également s’adapter aux déplacements urbains moyennant quelques précautions au niveau du compte-tours. De là à croire que cette moto est à mettre entre toutes les mains, il y a une pas que je ne franchirai pas ! On peut apprivoiser sa puissance à condition d’avoir une certaine expérience.
Si on devait lui trouver quelques faiblesses, je citerais son autonomie limitée liée à une consommation perfectible, le déflecteur un peu juste pour les grands, quelques cognements à bas régime en mode urban et la faible capacité de la valise de droite.
Même si son tarif est salé, la version S est à conseiller afin de bénéficier des technologies dernier cri et d’une bagagerie.
Evidemment, le prix est à l’avenant. Mais, il n’est pas certain que la concurrence soit beaucoup moins chère. Par exemple, la BMW S 100 XR full options vaut 26.278 € sans la bagagerie.
Si vous souhaitez en savoir davantage...
https://www.ducati.com/fr/fr/motos/multistrada/multistrada-v4
Les +
- Moteur fabuleux
- Electronique archi complète
- Look à l’italienne
Les –
- Tarif salé mais justifié
- Consommation et autonomie
Les concurrentes
BMW S 1000 XR – KTM 1290 Super Adventure
Caractéristiques techniques
Type : 4 cylindres 4T, double ACT, 4 soupapes
Alésage x Course : 83 x 55,5 mm
Cylindrée : 1158 cm3
Puissance : 125 kW (170 cv) à 10.500 t/min
Puissance fiscale : 11 cv
Couple : 125 Nm à 8750 t/min
Alimentation : injection
Mise en route : démarreur électrique
Transmission : 6 rapports, chaîne
Cadre / Chassis : monocoque en aluminium
Suspension avant : fourche inversée 50 mm, débattement 170mm
Suspension arrière : mono amortisseur, débattement 180mm
Type de freinage : ABS couplé
Frein avant : double disque, diamètre 320 mm
Frein arrière : disque, diamètre 265 mm
Pneu avant : 120/70 x 19
Pneu arrière : 170/60 x 17
Poids : 218 kg à sec
Hauteur de selle : 840-860 mm
Empattement : 1567 mm
Essence : 22 litres
Norme : Euro5
