Seule vraie nouveauté dans la gamme Suzuki pour ce millésime 2018, la SV 650 X ne pouvait que retenir notre attention. Nous l’avons testée dans sa version limitée à 35kw pour les titulaires d’un permis A2.
En raison de sa récurrente pénurie de nouveautés –le développement d’une MotoGP performante, ça vous plombe les budgets !-, Suzuki peine à retrouver son lustre passé. La qualité des motos n’est certes pas en reste, mais tous les amateurs de la marque d’Hamamatsu ne peuvent que déplorer la situation actuelle du quatrième constructeur japonais. Pour booster les ventes de sa nouvelle SV, sortie en 2016 et qui ne parvient plus à s’imposer comme l’avait fait la première du nom en 1999, Suzuki en propose cette année une version X inspirée de la SV « Rally Concept » qu’on avait aperçue au Japon voici deux ans. Analysons donc nos impressions, poste par poste, après 500km passés derrière ses bracelets.
Esthétique et finition
Ces chapitres n’ont jamais constitué les points forts des trois générations de SV. Même s’agissant du modèle actuel apparu en 2016, l’échappement reste disgracieux (mais mélodique), les durits et autres câbles trop apparents lui confèrent un air d’usine à gaz qui nuit à sa plastique; pour tout vous dire, nous préférions la Gladius. Mais avec cette version X, les choses évoluent dans le bon sens : le capot de phare délicieusement rétro, les bracelets « crapuleux », les platines noires et la peinture classique, avec « Suzuki » écrit en toutes lettres (et plus un simple « S ») viennent fustiger la sagesse esthétique et trop consensuelle de la SV standard. A cela s’ajoutent une sellerie spécifique très qualitative et un réglage de précontrainte sur la fourche. A vrai dire, les différences avec une simple SV s’arrêtent là. Qu’à cela ne tienne néanmoins car, même si certains grinceront des dents, ces éléments suffisent à faire de la X une nouvelle moto. Et une moto qu’on trouve belle, contrairement aux opinions générales glanées il y a deux ans au guidon de la SV. Manifestement, la mode du vintage fait son office en offrant à la X un potentiel de séduction en hausse, ce que nous trouvons parfaitement justifié dans l'ensemble. Certes, elles serait encore plus sexy avec un silencieux plus compact, un sabot et des écopes de radiateur mais, telle quelle, elle attire les regards.
Equipement et aspects pratiques
Pratiquement pas de rangement sous la selle, pas de poignées pour le passager, rien pour arrimer un sac derrière vous, ... Il faut bien que Suzuki contienne son budget et ma foi, la marque y parvient car, pour 7299€, on hérite d’une moto amusante, à la fiabilité éprouvée (depuis 20 ans !) et à la personnalité esthétique effective. De son côté, l'instrumentation est complète et précise; on y apprécie spécialement le décompte kilométrique qui vous renseigne sur votre autonomie restante. Le réglage de précharge désormais présent sur le fourche permet aussi au pilote d’adapter sa suspension à ses velléités de pilotage plus sportif voire à un désir de confort accru ; c’est simple, peu onéreux et bienvenu. Un peu comme les deux dispositifs Low RPM Assist (on y revient plus bas) et Easy Start System qui permet de lancer le moteur d'une brève impulsion sur le démarreur.
Confort
Sur une SV, la protection au vent est inexistante d'origine, comme de juste sur un roadster. Si le capot de phare évoquant les vieilles Anglaises donne du charme à cette Suz’, il n’apporte rien en termes de protection. A l’inverse, les guidons bracelets génèrent une position de conduite plus en appui sur les poignets mais sans excès aucun, de sorte que le buste résiste mieux à la pression du vent et c’est tout bénéfice pour le pilote. Comme de coutume sur les dernières Suzuki (GSX-S 750 et 1000 en tête), on note une sellerie très ferme qui nuit au confort si la route se prolonge ; c’est le cas sur la SV standard, ce l’est aussi sur la X. Enfin, on lui pardonne car cette selle bien finie a un petit côté artisanal de bon aloi. En ce qui les concerne, les suspensions un peu fermes n’ont rien de bondissant et respectent donc l’anatomie du motard. Quant à la position de conduite, elle s’avère très naturelle et ergonomique pour tous les gabarits.
Moteur
C’est bien entendu LA qualité proverbiale de toutes les SV depuis 1999! Il en a assuré le succès durant plus de dix ans, et il n’a rien perdu de sa superbe aujourd’hui. Ce moulin raisonnablement souple (démarrer en 3° ne pose pas de problème), est coupleux et expressif tout en vous offrant un "jump" très plaisant à 7500rpm. C'est un engin à plaisir qui ravira à coup sûr tous les propriétaires de SV. Notons qu'avec ses 76cv, il offre des performances de premier plan dans la catégorie. On n'a qu'à bien se tenir chez les Yamaha MT ! Evidemment, tout cela concerne la full power ; qu’en reste-t-il sur notre exemplaire limité à 35kw et qui perd donc une trentaine de chevaux dans l’aventure?
Eh bien cette « castration chimique » s’opère plutôt bien sur la SV X puisqu’en réalité, la version A2 se comporte à peu près comme une full power jusqu’à environ 6000rpm. Elle perd un peu, mais elle conserve son caractère moteur séduisant et une puissance suffisante pour déposer magistralement l’immense majorité des voitures. Bien sûr, passé ce seuil de 6000rpm, le vaillant bicylindre s’essouffle et ne monte plus que péniblement vers la zone rouge, que l’on n’atteindra du reste jamais ni en cinquième ni en sixième. Il faut donc utiliser cette SV assagie sur le gras du couple, et elle reste ainsi plutôt gaie à emmener.
Revers de la médaille toutefois : la 35kw consomme un litre de carburant supplémentaire en moyenne qu’une version standard. Ainsi, notre consommation s’est étable à 6,4L/100km, en mode « j’essore systématiquement la poignée droite »… Et pour le "hors-la-loi" que la question taraude, cette 35kw a emmené votre volumineux et lourd serviteur à un beau 171km/h au compteur. En Allemagne? Bien entendu!
Suspensions
Fermes donc, mais pas trop, elles ne nuisent pas au confort... Sur la SV standard, on notait un certain désaccord avant/arrière sur les revêtements bosselés; cette caractéristique peut être matée sur la X grâce au réglage de précontrainte présent sur la fourche: en l'assouplissant, on gagne en confort et on l'apparie mieux avec le combiné arrière; d'une pierre deux coups donc. D'autant que la moto demande alors à être menée moins fermement que la SV simple.
Transmissions
Voilà un autre point fort des SV actuelles, qu'elles soient "X" ou non: grâce à l'assistance à l'embrayage Low RPM Assist, tout est d'une parfaite douceur et caler devient virtuellement impossible, même en cas de périlleux démarrage dans une ruelle en côte. Une belle avancée et même une bénédiction pour les motards peu expérimentés que vise cette version 35kw! Mais aussi pour les plus aguerris puisque le dispositif leur garantit -ou presque- des départs canons pour enfumer toute concurrence lors des "Grands Prix de feux rouges"... Par ailleurs, la boîte précise et bien étagée, dans la plus pure tradition nipponne.
Comportement dynamique
Par les caractéristiques de son châssis, la SV est une moto plus stable et rigide que vive. Là encore, il s'agit d'une caractéristique susceptible de plaire au plus grand nombre; N'allez pas en déduire que c'est un autobus dans les pifs-pafs, loin de là même: la SV-X est précise et ne regimbe pas à aller chercher un point de corde, mais elle demande à être emmenée. Et encore, grâce à sa fourche désormais réglable, la X y est moins sujette qu'une SV standard.
Freinage
Il est excellent bien que manquant un peu de mordant à l'attaque du levier pour les motards expérimentés. Pour les autres par contre, c'est une qualité car le frein est aisément dosable grâce à sa progressivité. On note que la machine ne se relève que modérément lors d'une décélération sur l'angle. En outre, le frein arrière offre un mordant qui en fait davantage qu'un simple ralentisseur. Enfin, l'ABS est peu intrusif et donc intuitif tant à l'avant qu'à l'arrière.
Budget
Affichée à 7299€, la SV-X se positionne agressivement et en donne au client pour son argent. Elle n'a selon nous rien à envier à une MT-07 et, pour un prix équivalent, nous aurions même tendance à la trouver plus séduisante que la Yamaha en raison de son inspiration vintage. Notons que sa consommation (qui peut descendre sous les 4L/100km en conduisant placidement) s'accommode bien de son petit réservoir limité à 14,5L. Naturellement, une version 35kw comme celle que nous essayions est davantage sollicitée pour offrir un plaisir comparable et ne vous permettra sans doute pas de dépasser 200km d'autonomie.
