Le plaisir des yeux
Le moins qu'on puisse dire, c'est que du côté public et badauds, les deux motos ont un pouvoir de séduction indéniable. Le monde se presse autour d'elles à l'arrêt et se retourne à leur passage, vous vouliez rouler en sportive, vous voilà gâtés.
Le look de nos deux monstres ne passe pas inaperçu. Pourtant, les différences entre les deux sautent aux yeux : la gsxr se montre plus imposante, donnant une impression de " lourdeur " par rapport à la Kawa. L'avant de la Suzuki est certes bien acéré mais la vue d'ensemble ne plaide pas en sa faveur . on ne la confond pas avec une routière, surtout dans un groupe de motos de tous genres, mais arrêtée à côté de la zx10-r le doute s'installe.
Il faut avouer que la ZX10R semble tout droit sortie d'un circuit et qu'on lui a juste rajouté les clignos, rétros et phare pour pouvoir rouler sur route. Elle est fine, racée, d'une allure légère et épurée à tel point qu'il est difficile de croire qu'il s'agit bien d'une 1000.
Même en regardant les tableaux de bord, la différence frappe avec du côté Suzuki un ensemble paraissant plus complet alors que la Kawa regroupe tout en seul bloc compte-tours aux couleurs surprenantes... C'est la première fois que nous voyons une zone verte sur un compte-tours, nous y reviendrons.
Chez Kawa, l'amortisseur de direction trône fièrement au dessus du Té de fourche, alors qu'il se cache sur sa concurrente.Pour le jeu des 7 erreurs, un bon dessin vaut mieux qu'un long discours, nous vous laissons le soin de comparer les deux motos avec nos photos.
Tenue de route de rigueur
On pouvait s'y attendre, la tenue de route de nos deux belles enterre les autres styles de motos, surtout pour un usage au quotidien ou en balade. On suit le rythme sans aucune appréhension, elles semblent toutes deux collées à la route. Nous sommes impressionnés par la facilité de conduite qu'apportent ces deux machines, nous pensions avoir bien des difficultés à maîtriser des motos prévues pour la course sur nos petites routes belges et au contraire, elles s'en sortent très bien.
Nous devons toutefois différencier une fois de plus la gsxr qui semble très instinctive, elle paraît se placer et tourner rien qu'en y pensant. Plus besoin de réfléchir ou de calculer, visualisez le tournant et la gsxr semble avoir interprété vos pensées et vire sans souci, qu'il s'agisse d'un virage serré ou d'une courbe rapide, elle le fera sans vous effrayer.
En balade, vous vous amuserez même de cet avantage en doublant aisément vos compères même dans les virolos, il suffit d'adapter votre trajectoire et vous passerez à leurs côtés avec le sourire dans le casque. La Zx10R n'est bien sûr pas en reste, elle en serait même plus facile à manier mais à notre sens, elle parait moins instinctive. C'est peut-être contradictoire mais la gsxr semble plus facile, la zx10r parait, elle, plus incisive et on en revient à notre comparaison du look : une moto plus accessible chez Suzuki et une moto de course chez Kawasaki : efficaces toutes les deux, facile pour la Gex et plus racing pour la zx10R.
La Kawa semble vraiment faite pour traquer le chrono malgré un poids plus élevé, sans dépasser toutefois les 210 kg avec les pleins.Si nous devons parler du freinage, que dire d'autre que pour un usage sur route, il sera impossible de les prendre en défaut. Il faut toutefois vous mettre en garde, nos deux sportives freinent très fort et l'abs n'est pas au rang des options. Pour éviter des frayeurs, il vous faudra agir avec doigté et une expérience est plus que bienvenue pour ne pas se mettre au tas au premier freinage.
Point de vue matériel, nous retrouvons des disques de 310mm à l'avant sur les deux machines, fixation radiale bien sûr et en pétale sur la Kawasaki comme sur la plupart des modèles de la marque. Une fois de plus, la gsxr semble plus conciliante en permettant quelques approximations avec un peu plus de douceur. Enfin ça reste relatif, vu les vitesses que peuvent atteindre nos deux belles, sur une distance très courte, il vaut mieux que ça freine fort. La Zx10R est celle qui offre le plus de mordant, sur le sec, vous pourrez freiner tard et fort mais avant le virage.
En courbe, il vaut mieux utiliser le frein arrière si vous devez corriger la trajectoire, car le frein avant fera relever la moto si vous avez été trop brutal. A ce jeu, la gsxr permet plus facilement de freiner de l'avant en courbe.Comme nous le notions ailleurs, nous avons eu droit à la pluie pour une partie de nos essais et malgré le freinage puissant, la gsxr et la zx10R se sont prêtées au jeu sans mauvaise surprise, preuve une fois de plus qu'elles restent exploitables. Nous regrettons toutefois que l'ABS ne soit pas de la partie, on y gagnerait en agrément autant sur route que sur circuit. Voyez à ce propos ce qu'on peut dire du C-ABS équipant la Honda CBR 1000 RR 2010.
L'utilisation au quotidien
Le choix du titre n'est pas un hasard, nous avons bien voulu tester ces deux machines pour aller travailler et pour une balade dominicale. Comme nous le disions plus haut, nous voulions voir si ces deux motos si souvent testées sur circuit peuvent convenir à un motard qui ne voit la piste qu'à la télévision ou qui ne connaît même pas la signification de 'sliders '.
Commençons par le cas de divorce, le duo n'est pas leur point fort, la Kawa de notre essai était même livrée avec le capot de selle, faute d'équipement en notre possession, nous ne pouvions pas l'enlever et nous n'avons pas trouvé de volontaire pour monter dessus, pas étonnant nous direz-vous... La position du passager (ou de la passagère) sur les deux ne sera guère confortable.
Côté pilote par contre, on ne se plaint pas trop, en tout cas moins que nous le pensions. Comparatif oblige, la zx10R est la plus typée course, penché en avant, jambes plus repliées, avec plus d'appui sur les poignets, vous serez bien plus vite fatigué à son guidon que sur la gsxr qui permet une position sportive mais moins exclusive.
Nous avons même utilisé cette dernière pour la balade des 1000 virages ce qui représente une sortie de 450 kms sur la journée, et point besoin de massage quand la moto est rentrée au garage. La ZX10R nous aurait gratifié de quelques courbatures sur le même parcours, ce qui ne nous a pas empêchés de la sortir toute une journée.Pour un usage au quotidien, c'est cette fois la gsxr qui prend les devants : le tableau de bord est complet et lisible, télécommandé au guidon pour faire défiler les informations, la cartographie sélectionnable en roulant est aussi un atout indéniable. Pour ceux qui ne connaissent pas, vous avez le choix entre 3 modes : A pleine puissance, B pleine puissance mais arrivée moins brutale et C puissance réduite et moins brutale. Si entre A et B, la différence est moins flagrante, le mode C nous a permis de revenir de notre importateur sous une pluie battante sans nous faire peur avec la gestion des gaz. Ce mode est aussi intéressant sur des chemins en mauvais état, rendant la poignée moins sensible.La ZX10R a aussi droit à sa sortie sous la pluie (on ne teste pas à moitié chez Objectif-moto) mais nous étions toutefois moins rassurés avec la pleine puissance bien présente à chaque rotation de la poignée.
Au chapitre des comparaisons, nous avons été surpris des soubresauts de la gsxr sur des routes très bosselées, à vrai dire, c'est même les seuls endroits où nous aurions aimé rouler sur autre chose tellement les poignets et les épaules ont souffert de cette portion défoncée longue de quelques kilomètres et où la fourche avant n'a cessé de nous remonter des chocs peu agréables. Sans être passé sur le même tronçon avec la ZX10R, celle-ci n'a jamais sursauté comme sa concurrente et est toujours restée collée à la route. L'excès de sportivité peut donc aussi avoir du bon...
Point positif pour nos deux machines, en roulant tranquillement (enfin, presque raisonnablement), la consommation de nos deux belles est restée raisonnable : le passage en réserve de la gsxr s'est fait à 235 kms et nous avons encore parcourus un bon 20 kms sur la réserve avec un plein de 17,5 litres, ça nous donne une consommation en dessous des 7 litres aux cent. La Kawa s'est montrée un peu plus gourmande à moins que ce ne soit le pilote qui était plus généreux avec la poignée droite...
De la puissance à revendre
Là vous allez être gâtés : pas de mauvaises surprises, vous vouliez une grosse sportive, vous l'avez entre les mains : 185 cv pour la gsxr, 188 cv pour la Kawa (sans le Ram Air). Nous émettrons ici toutes nos réserves de prudence. Prenez garde, même si nous les trouvons utilisables, elles n'en restent pas moins des supersports d'une puissance à faire peur. Les 3 modes de la Suzuki adoucissent un peu le paysage mais malgré tout, un débutant ne serait vraiment pas dans son élément.
La sonorité des deux flutes titanes de la gsxr est remarquable et très valorisante, un vrai bonheur qui fera le malheur des accessoiristes : deux silencieux en titane émettant un si beau son, il sera compliqué d'avancer des avantages supplémentaires. La ZX10R était équipée d'un silencieux Akrapovic avec une sonorité vraiment racing et d'autant plus rageuse qu'on monte dans les tours.
La Gsxr semble exploser sur tous les rapports, dès les premiers tours jusqu'aux 14.000 tours de la zone rouge, la zx10R fait parler la foudre une peu plus tard mais vous allonge encore plus les bras. encore plus violente. Du coup, sur circuit, on imagine la ZX10R bien devant alors que sur route la gsxr semble plus exploitable.
Nous disons bien exploitable mais nous sommes très loin d'une utilisation optimale. En balade, les pauvres shift-lights n'auront pas le loisir de fonctionner, impossible (ou inutile) de monter autant dans les tours, les vitesses atteintes seraient inavouables (pour vous dire, il y aurait de quoi perdre son permis sur autoroute à fond de deuxième). Même la fameuse zone verte sur le compte-tours de la Kawa commençant à 6000 tours ne sera pas atteinte sur les derniers rapports aux vitesses légales... Sous-exploitées, nos deux supersports n'ont quasiment pas leur place sur route . méchantes, puissantes...
Lors d'une balade sympa, on sent bien qu'elles en attendent plus de leur pilote et si elles lui autorisent ce genre de sortie, on se demande bien à quoi peuvent servir tous ces chevaux, à part vous faire perdre votre permis plus sûrement.
La gsxr vous clouait déjà les yeux au fond du casque en ouvrant en grand sur le mode A. la ZX10R vous éjecte de la moto, sur tous les rapports, pensez à serrer vos genoux pour qu'ils viennent se coincer sous le réservoir sans quoi elle aura vite fait de vous laisser sur place. Préparez-vous à voir vos bras s'allonger, car la zx10R pousse vraiment très fort.
De notre avis personnel, il est bien difficile de donner une préférence à l'une ou l'autre. La Gsxr donne l'illusion qu'elle n'a pas de limite, peu importe la vitesse enclenchée, la rotation de la poignée vous catapulte en avant, il n'est pas nécessaire de jouer du sélecteur pour un dépassement, même en 6ème. Pour nous, inculte des circuits, elle est un vrai bonheur, jamais limitée, puissante mais contrôlable.Le plaisir sur la ZX10R est tout autre, le moindre bout de route dégagé se transforme en grand prix, il faudra cependant rester dans les tours, on sent nettement la différence dans les bas régimes où sa rivale reprend directement, la grosse verte demandera plus de vigueur mais une fois dans la fameuse zone verte, elle sera plus violente. Le pilote doit vraiment s'accrocher, jamais la "bleue" (oui la nôtre était noire) n'a donné la sensation de vous laisser sur place à l'accélération. Au début, ça fait peur, ça impressionne, après quelques kilomètres, nous n'avons plus peur mais on reste impressionné. Il faut un vrai pilote pour jouir pleinement de la Kawa alors qu'un bon motard profitera plus vite de la gsxr sans exploiter aucune des deux sur route ouverte ou alors avec tous les risques que ça comporte, pour lui, son permis et les autres.
Au final, ça roule sur route ?
Vous l'aurez compris, il y 1000 et 1000 même dans les supersports. Celui qui aime rouler sur une sportive tout en gardant un certain confort et qui ne se soucie pas des chronos à abattre sur circuit appréciera la polyvalence de la gsxr.
Le motard qui ne veut aucun compromis et vouera toute ses sorties à la course, choisira la ZX10R au look encore plus radical et qui, comme son pilote, ne fera aucune concession à un usage routier.La ZX10R est une moto qui semble tout droit sortie d'un circuit, la gsxr en devient moins agressive mais pas moins belle. A l'usage, la différence reste valable avec une Kawa plus exclusive et une gsxr plus accueillante et conciliante.Le point commun aux deux monstres : à ne pas mettre entre toutes les mains, leur puissance effrayante demande une certaine expérience pour bien doser les accélérations et les freinages.
La ZX1OR 2O1O est prête à faire parler la foudre.Derrière, cachée dans l'ombre la Gsxr1000 2010 attend la première occasion pour prendre sa place.