Kronreif und Trunkenpolz, Mattighofen ou KTM, marque autrichienne dont la devise, inscrite sur chaque moto, « Ready to race » annonce d’emblée la mission : fabriquer des motos performantes, quelle que soit leur catégorie.
Comme tous ses concurrents, KTM produit des modèles de référence qui concentrent toutes les nouveautés techniques et technologiques de la marque. Dans la catégorie trails, la 1290 Super Adventure est une icône qu’on ne présente plus. En 2015, les ingénieurs autrichiens ont eu l’idée géniale de mettre un des moteurs les plus caractériel du marché, celui de la Superduke R, dans un châssis trail. La Super Adventure était née. Moins de dix ans et trois mises à jour plus tard, la dernière datant de 2021, elle présente un nouveau look et améliore sa connectivité et intégrant au compteur TFT de 7 pouces une navigation « turn by turn » accessible via l’application KTM Connect. La Super Adventue est proposée en deux versions : S typée route et R à vocation off-road.
Lors de la réception de la version S à Gembloux chez pratiquement le seul importateur resté sur la terre Wallonne, le responsable marketing résume le cahier des charges fixé par les responsables de KTM à leurs ingénieurs : « Faire mieux que la GS ». J’étais donc impatient de voir si l’objectif est atteint.
La version 2023 est pratiquement entièrement neuve. A part les freins et les roues, des multiples modifications et innovations ont été apportées afin de répondre aux remarques des utilisateurs, mais également avec l'objectif de faire progresser la Super Adventure de manière à la rendre plus compétitive dans le cadre d'une concurrence de plus en plus acharnée.
Un moteur high tech
Pour KTM, le seul moteur qui convient à ce type de moto est un bicylindre coupleux, dynamique et souple à bas régime. C’est donc toujours le LC8, bicylindre en V à 75° de 1.301 cc de 160 CV et 138 Nm de couple, qui équipe la Katoche . Il a été totalement amélioré afin d’être plus léger, plus sobre au niveau consommation et adapté à la norme EURO 5.
La boîte à 6 rapports est signée Pankl Racing Systems AG, un firme autrichienne spécialisées dans les composants dynamiques de haute technologie destinés à la course automobile et à l’aérospatiale. Elle est plus légère et permet un passage plus rapide des rapports, grâce notamment au Quickshifter+ irréprochable, mais malheureusement en option.
L’embrayage anti-dribble est un modèle de douceur. Il intervient également à l’ouverture des gaz afin d’éviter le broutage de la roue avant en cas de freinage brutal ou de décélération soudaine.
Une culasse de dernière génération associe un double allumage, des orifices optimisés pour les flux, 4 soupapes par cylindre, des cames du double arbre à cames en tête qui commandent des basculeurs revêtus de DLC (Le Diamond Like Coating est un revêtement issu de la nanotechnologie qui possède des propriétés de dureté et de résistance au frottement tout à fait exceptionnelles) qui facilite le glissement et améliore ainsi les performances
Les pistons forgés dérivés de la F1 permettent de supporter des charges importantes. Leurs jupes bénéficient de la finition Grafal, un traitement spécial qui permet de réduire les frottements et assurer une durée de vie plus longue.
Le vilebrequin a été amélioré afin de d’optimiser la réponse du moteur et sa montée en régime.
Une 6ème overdrive, un accélérateur Ride by Wire et un rapport poids/puissance parmi les meilleurs de la catégorie assurent une consommation limitée et un agrément de conduite supérieur.
Le système d’échappement a été adapté à la norme EURO 5 via deux nouveaux collecteurs reliés à trois sondes Lambda.
La boîte de filtre à air a été redessinée afin de faciliter l’accès et l’entretien du filtre.
Les deux radiateurs indépendants assurent un meilleur refroidissement du moteur ainsi qu’une évacuation optimale de la chaleur. Les arrivées d’air ont été optimisées pour le moteur, mais également pour le confort du pilote.
Une partie cycle remaniée.
Le cadre est en aluminium et chrome-molybdène. La colonne de direction a été raccourcie de 15 mm afin d’améliorer la maniabilité dans les virages, alors que le bras oscillant a été allongé dans les mêmes proportions afin d’optimiser la rigidité et l’équilibre.
Les suspensions White Power (WP) de dernière génération offrent un amortissement optimal grâce à de nombreuses possibilités de réglage. Le kit de suspension PRO permet de bénéficier d’un réglage automatique des suspensions. Afin d’assurer un contrôle optimum de la moto en toutes circonstances, un amortisseur de direction est monté d’origine.
Le freinage est signé Brembo. A l’avant, deux disques de 320 mm avec étriers fixes à quatre pistons. A l’arrière un disque de 267 mm. L’ ABS Bosch à 2 canaux complète le tout.
Innovation majeure de la 1290, son réservoir de 23 litres composé de trois parties dont deux basses situées de part et d’autres de la moto.
Choisis par KTM pour leur fiabilité et leur longévité, les Mitas Terra Force-R ont été développés spécialement pour la Super Adventure S.
Afin d’adapter la moto à la morphologie du pilote, le guidon et des repose pieds sont réglables.
Connectivité up to date.
L’écran TFT de 7 pouces propose un graphisme original. Equipé du Bluetooth, il peut être connecté à un smartphone via l’application « KTM Connect ». Outre les fonctions multimédia habituelles, elle intègre une navigation turn by turn simple mais efficace.
Aides au pilotage pléthoriques.
- MTC ou contrôle de traction désactivable.
- Régulateur de vitesse adaptatif grâce au radar situé sous le phare.
- Système Keyless équipé d’une fonction antivol baptisée Anti Relay Attack (ARA) désactivable qui empêche toute utilisation abusive du système.
- ABS complet dont un mode supermoto, off-road et ABS Cornering qui mesure les forces de freinage en fonction de l’angle d’inclinaison de la moto dans le virage. Lorsque la moto est penchée, l’ABS se déclenche progressivement et agit simultanément sur les freins.
- Le Moto Stability Control de Bosch qui travaille notamment en relation avec l’ABS cornering et dispose d’un antiwheeling ainsi que d’un contrôle de traction en courbe qui réagit dès que la rotation de la roue arrière est trop différente de l’arrière et au régime moteur.
- TPMS, surveillance de la pression des pneus.
- Extinction automatique des clignoteurs.
- Quick Shifter up and down (option)
- Moto Slip Regulation (MSR) ou régulation du patinage moteur (option)
- Aide au démarrage en côte (HHC) (option)
Premières sensations.
Le look KTM, on aime ou pas. Pour ma part, je ne suis pas fan de ce phare au look d’Alien. Pour le reste, je constate avec plaisir que les formes de la Super Adventure se sont arrondies, principalement au niveau du carénage qui s’élargit dans sa partie basse cachant de la sorte davantage le moteur. La nouvelle boucle arrière s’est également quelque peu allégée.
La position de conduite est ergonomique. Les bras sont légèrement pliés et la largeur du guidon idéale. Même si elle me paraît un peu dur au premier abord, l’assise est confortable. Les jambes s’intègrent parfaitement dans le nouveau carénage. Pour une moto aussi sophistiquée, le nombre de commandes (rétroéclairées) est raisonnable. L’accès à la bulle réglable manuellement sur 55 mm est aisé, même d’une main en conduisant. La hauteur de selle varie de 849 à 869 mm. Elle convient parfaitement à mon 1,85 m. Un vide-poche permet de ranger et de recharger un smartphone pourvu qu’il ne soit pas trop grand.
Une fois le contact mis…rien ne se passe et l’écran reste désespérément noir car j’ai oublié de désactiver le système ARA qui empêche une utilisation malveillante du système Keyless. Une simple pression sur la clé et le démarreur et le LC8 s’ébroue avec le bruit caractéristique du bicylindre.
Histoire de ma familiariser progressivement avec les 160 chevaux autrichiens, j’ai sélectionné le mode Street. Vu les multiples possibilités de réglages des suspensions, je choisis la facilité en sélectionnant le mode Auto. Me voilà parti pour une journée au guidon de la Super Adventure S.
Pressé de rejoindre les petites routes ardennaises, je débute par une bonne portion d’autoroute. La protection des jambes est excellente. Au niveau supérieur, la bulle aurait mérité quelques centimètres de plus afin d'atteindre le confort offert par la concurrence. Ceci dit, la protection est correcte et on peut envisager les longs trajets sans problème. J’en profite pour tester le Cruise Control adaptatif avec lequel j’ai eu l’occasion de me familiariser sur la BMW RT. A l’usage, je constate que régler la distance minimum d’intervention n’est pas évident. Si elle est trop longue, la moto ralentit trop tôt et risque de surprendre les véhicules qui suivent. Si elle est trop courte, on doit déboîter rapidement avec les mêmes conséquences. Il faut donc trouver le juste milieu. Ceci dit, c’est évidemment un plus au niveau sécurité.
En mode Street, la cavalerie est maîtrisée mais répond du tac au tac si on la sollicite. Les dépassements ne posent aucun problème et je croise à 120 dans le plus grand confort.
J’avais conservé d’un précédent essai le souvenir de la brutalité du moteur KTM. Force est de constater qu’il s’est considérablement, non pas assagi car en mode Sport il est toujours aussi décoiffant, mais assoupli, contribuant ainsi à l’agrément et au confort de conduite. Le Ride by Wire qui permet de doser la poignée de droite avec précision y est certainement pour quelque chose.
Une fois sorti de l’autoroute, j’emprunte les routes sinueuses du Condroz. Et là, c’est le vrai bonheur ! Le bicylindre reste raisonnable jusqu’à 4.000 – 5.000 tours, puis se lâche avec rage dès qu'on tourne la poignée de droite. 138 Nm pour un poids net de 220 kg, ça déménage ! Le choix de rester fidèle au mode de transmission par chaîne permet évidemment de gagner pas mal de kilos. En mode Sport, c’est un véritable régal à condition de maîtriser la bête car les aides électroniques ne peuvent pas tout !
Grâce à une excellente répartition des masses (50/50), la maniabilité de cette moto est bluffante. La conception du nouveau réservoir y est pour beaucoup car il permet d’abaisser le centre de gravité de manière significative. Les virolos les plus serrés se négocient avec aisance, même un peu trop au début, et les demi-tours passagère comprise sont un jeu d’enfant.
A propos de voyages en duo, la Super Adventure est conçue pour. La selle passager est confortable et les deux larges poignées assurent un excellent maintien. La bagagerie complète est proposée en option. Deux versions sont disponibles : Touring avec valises et top case en aluminium et plastique ou aluminium en collaboration avec Touratech. Malheureusement, comme souvent sur les trails, la valise côté échappement est amputée d’une bonne partie de son volume. Même si elle demande un temps d’adaptation, la manipulation des valises Touring est relativement aisée.
Niveau confort, il faudra prévoir quelques centaines d’euros supplémentaires pour les poignées et les selles chauffantes.
Le climat ardennais nous ayant gratifié d’une bonne heure de pluie fine, j’ai pu tester le mode Rain qui bride le moteur à 100 cv et adapte les aides aux conditions difficiles.
Côté consommation, le réservoir de 23 litres et une consommation de 5,4 litres permettent une autonomie de pratiquement 400 km.
Circuler en ville ne pose aucun problème grâce aux qualités déjà citées : un centre de gravité bas et un poids contenu. Les pieds posent bien à plats sur le sol. Le shifter irréprochable dispense de jouer de l’embrayage pourtant très agréable. Aucune chaleur incommodante ne vient incommoder le pilote.
Convivialité et ergonomie
Lorsqu’on a à sa disposition une telle pléthore de paramètres, il est parfois difficile de s’y retrouver dans les menus et les boutons qui permettent d’y accéder. Ce n’est pas le cas ici car KTM a conçu un ordi de bord particulièrement convivial et ergonomique. L’accès aux différents menus est aisé via le joystick situé sur le commodo gauche. Chaque thème est hiérarchisé et la sélection se fait toujours via le joystick. L’affichage peut être paramétré en fonction des infos souhaitées. La connexion avec l’app KTM connect ne pose aucun problème. Deux touches « favoris » facilitent la vie à bord.
Suspensions ready to race.
Les suspensions WP de la 1290 S méritent un article à elles seules. J’ai le choix entre les modes Sport, Street, Rain, Comfort et, en option, Pro avec le mode Off-road inclus. Ce dernier permet de sélectionner le mode Auto ou de régler l’ajustement des suspensions en continu. Enfin, la précontrainte permet de relever ou d’abaisser la moto sur 20 mm afin de l’adapter au style de pilotage et aux conditions de roulage.
Cerise sur le gâteau, le mode Comfort fonctionne selon le système Skyhook. Celui-ci fait en sorte que, même sur nos routes belges défoncées, l’assiette de la moto reste horizontale empêchant ainsi les chocs pour le ou les occupants. Un vrai régal !
Cardan or not cardan.
La majorité des gros trails étant équipés d’un cardan, on peut se poser la question de savoir pour quelles raisons KTM reste fidèle à la transmission par chaîne. Elles sont au nombre de trois : une meilleure transmission de la puissance, le poids réduit et le prix inférieur. A une époque où les prix et le poids s’envolent, cela mérite réflexion.
Ready for Off-road.
Je n’ai malheureusement pas pu apprécier les qualités TT de la Super Adventure. Mais, il ne fait aucun doute qu’avec la configuration proposée, elle est « ready for off-road ». Pour ceux qui veulent une moto davantage orientée TT, la version R s’impose.
Prix et politique des options.
Fixé à 21.099 €, le prix de base de la S est concurrentiel par rapport à ses rivales. Evidemment, les options font grimper le budget. Si les elles peuvent être choisies à la carte, KTM propose un Tech Pack à 1.288 €. A ce prix, c’est pratiquement un incontournable car il permet d’avoir une moto super équipée.
En full options au niveau confort (bagagerie, selles et poignées chauffantes, crash barres) et technologie (Tech Pack) l’addition monte à 24.711 €.
Conclusion.
A la question de savoir si la Super Adventure S rencontre un succès commercial, la réponse est nuancée : « Elles ne courent pas les rues à l’instar de la GS, mais elles ne s’amoncellent pas non plus dans le showroom des concessionnaires ». Il est un fait que, par rapport à la concurrence allemande, anglaise, voire japonaise, elle reste relativement discrète sur nos routes.
Personnellement, j’ai été séduit par la semaine passée au guidon de cette moto. Confortable, agréable à piloter, dotée des dernières technologies en matière de sécurité et d’aide à la conduite, animée…ou plutôt propulsée par un moteur extraordinaire et, qualité majeure, d’une maniabilité déconcertante. Elle ne présente que quelques petites faiblesses comme l’absence de Shifter d’origine, une protection du haut du corps perfectible à haute vitesse et trop peu d'espaces de rangement.
Niveau budget, la KTM propose un prix de base attractif et, pour un supplément raisonnable, un kit technique qui permet de bénéficier d’une moto super équipée.
A la question de savoir si les ingénieurs autrichiens ont rempli leur contrat, je ne peux que vous inviter à essayer cette superbe machine qu’est la KTM Super Adventure 1290 S car elle gagne vraiment à être connue !
Les +
- Bicylindre de rêve
- Maniabilité
- Confort et sécurité
- Prix de base
Les –
- Pas de shifter d’origine
- Protection du haut perfectible
- Espaces de rangement limités
https://www.ktm.com/fr-be/models/travel/ktm-1290-super-adventures2023.html
Caractéristiques techniques.
MOTEUR
- COUPLE : 138 Nm
- BOÎTE DE VITESSES : 6 vitesses
- REFROIDISSEMENT : Refroidissement liquide
- PUISSANCE : 118 kW
- DÉMARREUR : Démarreur électrique
- COURSE : 71 mm
- ALÉSAGE : 108 mm
- EMBRAYAGE : Embrayage anti-dribble PASC(TM) à actionnement hydraulique
- ÉMISSIONS DE CO2 : 134 g/km
- CYLINDRÉE : 1301 cm³
- EMSEMS : Keihin avec RBW et régulateur de vitesse, double allumage
- VERSION : 2 cylindres, 4 temps, V 75°
- CONSOMMATION DE CARBURANT : 5.7 l/100 km
- LUBRIFICATION : Lubrification par circulation forcée avec 3 pompes à huile
CHÂSSIS
- CAPACITÉ DU RÉSERVOIR : (ENV.)23 l
- ABS : Bosch 10.3ME combiné ABS (avec ABS efficace en courbe et mode Offroad)
- DIAMÈTRE DISQUE DE FREIN AVANT : 320 mm
- DIAMÈTRE DISQUE DE FREIN ARRIÈRE : 267 mm
- CHAÎNEX-Ring : 525
- POIDS NET : 220 kg
- MODÈLE CADRE : Cadre treillis au chrome-molybdène à revêtement de poudre
- SUSPENSION AVANT : Fourche inversée WP SAT (technologie semi-active) Ø 48 mm
- GARDE AU SOL : 223 mm
- SUSPENSION ARRIÈRE : Amortisseur WP SAT (technologie semi-active)
- HAUTEUR DE SELLE : 849/869 mm
- ANGLE DE CHASSE : 65.3 °
- DÉBATTEMENT AVANT : 200 mm
- DÉBATTEMENT ARRIÈRE : 200 mm