A une époque où la répression est prépondérante et où les soucis environnementaux dominent, comment ne pas tomber sous le charme d’une machine rationnelle sans être simpliste ? La Morini X-Cape 650 est de celles-là tout en y ajoutant des traits de caractère séduisants. Et elle est disponible à l’essai chez MV Agusta Namur !
Nul ne niera qu’une moto doit d’abord susciter une émotion esthétique. La X-Cape y parvient sans mal lorsqu’on la découvre pour de vrai, car elle est de ces engins à qui les photos font perdre une part de leur attrait. Les dimensions sont valorisantes et les lignes tendues évoquent clairement l’univers des rallyes-raids. Forte de ses 86 ans d’existence, la marque est bien présente sur les flancs du carénage et les couleurs italiennes distribuées çà et là confirment que si une Morini est désormais produite en Chine et soutenue par des capitaux chinois (depuis 2018), elle reste intégralement conçue en Italie. Du reste, les Transalpins supervisent tout le processus. En termes de design, leur influence est prégnante, de l’allure globale au silencieux élégamment biseauté en passant par le bras oscillant en aluminium ; sans même parler des freins Brembo ou de la fourche Marzocchi de 50mm.
Les Chinois du Zhongneng Vehicle Group, qui sort 500.000 scooters par an ( !), ont eu suffisamment de discernement pour recentrer d’abord Moto Morini vers le milieu de gamme, conscients que les anciennes Corsaro ou GranPasso 1200 n’avaient guère d’avenir. Et dans le cas de Morini, ils montrent un vrai respect pour le patrimoine de la marque et pour ses ressources humaines basées en Italie. Ensuite, puisqu’ils sont surtout focalisés sur les petites cylindrées sur leur marché intérieur, ils ont eu l’intelligence d’équiper leurs nouvelles motos italiennes d’un moteur sous licence Kawasaki ; un propulseur éprouvé et bien connu des conducteurs des anciennes Er6 et autres Versys. On en reconnaît d’ailleurs la sonorité, même si le caractère a changé comme nous le verrons.
Faisons le point
Quoique passé maître dans l’art de rationaliser une production, l’Empire du Milieu nous propose avec la X-Cape une moto aboutie qui n’a rien de commun avec une machine au rabais. Que du contraire car, à son guidon, on se dit souvent qu’il n’en faut pas davantage pour goûter goulument à tous les plaisirs motocyclistes. D’abord, la Morini présente bien avec des plastiques finement assemblés, une instrumentation complète qui, grâce au traitement mat de l’écran TFT 7 pouces ( !), reste lisible même au soleil, ou encore des maîtres-cylindres estampillés Brembo. La sellerie de belle facture, la bulle réglable manuellement et les commodos éclairés viennent étayer ensuite la qualité perçue.
On comprend aisément que la dotation électronique ne soit pas pléthorique sur une machine de 60cv, Morini fait ainsi l’impasse sur un contrôle de traction effectivement superflu. Cependant, on retrouve l’excellent ABS débrayable 9.1 de Bosch et un mode off-road qui, en lissant l’arrivée de la puissance, peut faire office de seconde cartographie d’injection pour les jours de pluie, par exemple. Mieux : dans l’écran « Bike info » de l’affichage, on retrouve même en temps réel la pression des pneus, une donnée caractéristique d’une moto plus onéreuse. Et s’il n’y a pas d’ordinateur de bord, la X-Cape a le bon goût d’afficher l’autonomie restante dès qu’on aborde la réserve de carburant. Un beau trail donc, plutôt simple mais généreux, on va le voir sur la route.
Prenons la route
Le bilan dynamique de la X-Cape est édifiant et démontre qu’une débauche de puissance et de technologie est loin d’être indispensable pour se faire plaisir et rouler décemment. On l’enfourche : la position est naturelle pour la majorité des gabarits, le cintre et la largeur du guidon idéaux et, si la selle paraît ferme de prime abord, elle ne l’est pas à l’usage. L’affichage est très lisible et alterne automatiquement entre mode jour et mode nuit ; il peut par ailleurs être couplé à votre téléphone tant pour visualiser les appels et messages que pour les divers réglages de votre musique. Les leviers sont réglables et, quand on prend la route de nuit, on apprécie bien entendu les commodos lumineux mais surtout l’éclairage (full LED, y compris les clignotants) qui assure une belle visibilité. La bulle d’origine, qui n’en impose guère par ses dimensions, assure pourtant un boulot remarquable. Dans sa position haute, elle permet même de rouler visière ouverte et, sur autoroutes, elle est étonnamment reposante. La Morini marque ainsi des points importants en termes de confort.
Le bicylindre s’ébroue dans une sonorité agréable et plutôt grave. Bien que sa cylindrée contenue ne lui confère pas l’élasticité d’un gros cube, il ne manque cependant pas de souplesse ; ainsi, à 3000 tours en sixième, il repart certes un peu paresseusement, mais sans cogner. On évoquait un caractère différent du moulin d’origine estampillé Kawa, et on en profite surtout au-delà de 5000 tours. Les accélérations ne sont pas ébouriffantes mais elles sont plaisamment vigoureuses avec même un dernier boost à partir de 7000 tours. De sorte qu’au total, l’agrément moteur est bien au rendez-vous et charme le pilote qui n’en attendait pas tant de ce bloc 650. Arrêtez-vous à la pompe, et il vous surprendra encore avec une consommation moyenne mesurée de 4,25L/100km sur les 700 bornes de notre essai. Le couteau entre les dents, nous sommes montés à 4,6L et… la queue entre les pattes, nous sommes descendus à 3,85L. On dirait bien qu’Euro5 a du bon !
Les Pirelli à grosses galettes qui équipent d’origine la X-Cape manquent parfois un petit peu d’adhérence si on décide de se la jouer « pilote », mais dans l’ensemble, ils font le job avec beaucoup de bonne volonté. Pour se faire pardonner, ils sont aussi susceptibles de vous emmener hors asphalte avec un certain brio tant que les chemins restent roulants.
En ce qui les concerne, les suspensions s’imposent comme une réussite majeure de cette Morini. Non contentes d’être confortables et d’estomper les irrégularités du bitume, elles assurent à la X-Cape des prestations dynamiques étonnamment élevées et qui nous ont plus d’une fois surpris par leur rigueur. Alliées à la rigidité de bon aloi assurée par le cadre tubulaire en acier, elles dotent la X-Cape d’une stabilité bluffante à haute vitesse. Des virages avalés poignée dans le coin ne l’effraient nullement, de même que des entrées en courbe énergiques.
Car en prime, la Morini est fort maniable, presque incisive –pour un trail- au moment d’aller chercher le point de corde. Vraiment, les ingénieurs ont fait du bon travail. Et ce ne sont pas les freins qui contrediront cette impression flatteuse (durits tressées partout) : on ne jure plus désormais que par les étriers radiaux ; eh bien les anciens Brembo axiaux stoppent la X-Cape avec une réelle vigueur encore accentuée par la fourche qui encaisse la décélération sans se tasser exagérément. On peut même se permettre de freiner sur l’angle sans crainte d’élargir sa trajectoire. Dosable comme ses homologues avant, le frein arrière manque un peu de mordant mais comme l’ABS n’a rien d’intrusif, ce n’est pas un problème. Avant de conclure, signalons que si certains confrères se sont plaints de ressentir des vibrations gênantes à certains régimes, ce ne fut pas le cas sur notre machine d’essai ; rien de remarquable ni de gênant.
Concluons
La X-Cape 650 est une réussite. Plaisante, efficace et confortable, elle reste très démocratique (de 7999€ à 8566€), alliant ainsi le meilleur de deux mondes : un savoir-faire italien couplé à la maîtrise des coûts dans laquelle les Chinois excellent. Au total, voilà un trail qui parvient à mêler la simplicité à un haut potentiel dynamique, pour le plaisir de son propriétaire. Un kit de valises (620€), des protections (140€), une bulle plus haute (155€) et des poignées chauffantes sont également disponibles en option et ne vous ruineront pas. Mais que demander de plus ? Peut-être que vous alliez l’essayer, comme nous, chez MV Agusta Namur… Et encore une chose: l'essai de la Seiemmezzo STR suivra sous peu!
Les plus
Les moins
- L’image à (re)construire
L'essentiel des données techniques:
Moteur : bicylindre en ligne, double ACT, 4 soupapes par cylindre, 649cc. 60cv à 8250rpm et 56Nm à 7000rpm, 6 rapports.
Châssis : treillis en acier, fourche inversée, mono amortisseur, double disque de 298 mm et monodisque de 255 mm, étriers 2 pistons, pneu avant 110x80mm 19 pouces, pneu arrière 150x70mm 17 pouces.
Dimensions : empattement 1 470 mm, garde au sol 175 mm, hauteur de selle 845mm, poids en ordre de marche 213kg et réservoir de 18L.
